Augeron (cheval) — Wikipédia
Région d’origine | |
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Région | Pays d’Auge, France |
Caractéristiques | |
Morphologie | Cheval de trait |
Taille | 1,58 m à 1,70 m |
Poids | Environ 715 kg |
Robe | Gris |
Statut FAO (conservation) | Éteinte |
Autre | |
Utilisation | Traction lourde |
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L’Augeron, également nommé Caennais ou Virois, est une ancienne race de grands chevaux de trait français originaire du pays d'Auge, fortement influencée par le Percheron, et de robe généralement grise, plus rarement noire. Elle doit son inscription comme race distincte par la Société hippique du trait augeron à la rigueur des éleveurs du Percheron, qui ont longtemps refusé l’inscription des chevaux nés hors du Perche à leur registre généalogique.
L'Augeron est désigné comme une race dérivée du Percheron en 1930, et inclus au registre de cette dernière race en 1966. Bien qu'il ait officiellement disparu, l'élevage du Percheron dans le pays d'Auge perdure, de même que le Syndicat du Trait Augeron.
Histoire
[modifier | modifier le code]Le statut de race a plusieurs fois été débattu pour le cheval Augeron, puisqu'il s'agit à l'origine de chevaux Percheron élevés dans le pays d'Auge, qui se sont légèrement modifiés au fil des années sous l'influence du sol et du climat[1]. Son existence comme race séparée s'étend entre 1913 et 1966[2]. Bien que plusieurs spécialistes regroupent les chevaux Caennais et Virois avec l'Augeron, l'ingénieur agronome Paul Diffloth dissocie les trois dans son ouvrage paru en 1904[3].
XIXe siècle
[modifier | modifier le code]Au XIXe siècle, selon Jean-Henri Magne, l'existence de cette population de chevaux est, malgré leur popularité, « généralement passée sous silence par les auteurs » [4]. À Paris, ils sont nommés des « Caennais » ou des « Virois », en fonction de leur provenance[4].
Ces chevaux sont vendus aux foires d'Argences et de Bayeux vers le Nord et l'Est de la Basse-Normandie[5]. Les poulains sont vendus aux cultivateurs des plaines, et du côté de Bernay, une partie d'entre eux arrivent dans le pays de Caux, la Beauce et la Brie[5]. Des poulains Boulonnais envoyés dans le pays d'Auge peuvent être ensuite vendus, à tort, comme des Augerons[6] ; Georges Bonnefont estime d'ailleurs que la race dite « Augeron » est en réalité constituée de chevaux Boulonnais élevés dans le pays d'Auge[7].
Sans avoir d'originalité dans son modèle, ce cheval est remarqué plusieurs fois pour son homogénéité et sa beauté[8], et estimé de grande valeur[9].
En 1858, il se vend de 600 à 1 200 francs[10].
XXe siècle
[modifier | modifier le code]La « Société hippique du trait augeron » se constitue en 1913 entre les éleveurs du pays d'Auge, afin d'inscrire ces chevaux dans un registre généalogique particulier. Une raison est à chercher dans la volonté de protection du berceau d'élevage des chevaux Percheron : seuls les animaux nés dans le Perche ont longtemps eu droit à l'inscription dans le registre officiel de la race, et par-là, à la dénomination « Percheron », ce qui exclut des populations de chevaux de trait proches, mais nées dans d'autres régions, comme le trait du Maine et l'Augeron[11],[12].
En 1924, la race compte 2 300 représentants[1]. En 1930, un classement savant établit que deux races de chevaux de trait français ayant leur propre registre, le trait Augeron et le trait du Maine, sont des variétés du Percheron[1]. L'Augeron décline en nombre dans les années 1950, comme toutes les races de trait affectées par la motorisation de l'agriculture[11]. Finalement, il est fusionné avec le Percheron en 1966, en même temps que le trait du Maine, le Berrichon, le Nivernais, le Bourbonnais, le trait de la Loire et le trait de Saône-et-Loire[13],[14],[15],[16].
Cela n'empêche pas les éleveurs de Percherons du pays d'Auge de rester en activité. En 1982 est créée l'« Association régionale pour la relance de l'élevage du cheval lourd en Normandie » ; neuf ans plus tard, cette association change son nom en « Association pour la relance du cheval de trait en Basse-Normandie », et change aussi de présidence, en élisant M. Spruytte, qui dirige le syndicat du trait Augeron, promouvant l'attelage et les activités sportives avec le cheval de trait[17]. Depuis , elle est dirigée par M. Hurel, secrétaire du syndicat du trait Augeron depuis 18 ans[17].
Description
[modifier | modifier le code]C'est un cheval énergique, fort et bien découplé, de haute taille[4],[10],[18],[19] soit de 1,58 m à 1,70 m[1],[20] ; les chevaux des environs de Vire, les Virois, sont plus petits. La race ressemble beaucoup au Percheron, et se distingue du Boulonnais en ce qu'elle est plus élancée et plus légère[4]. L'Augeron est également décrit comme plus grand que le Merlerault, et plus distingué que le cheval du Cotentin[21].
Morphologie
[modifier | modifier le code]Il est massif[18] et très solidement constitué, mais plus souvent long et élancé que court et trapu[4]. Eugène Gayot le décrit, en 1861, comme un cheval distingué aux formes agréables[22], Jean-Henri Magne ajoute qu'il se distingue aussi par la finesse de sa peau, et évoque un solide cheval pesant 715 kg, dont les harnais, collier, sellette et courroies pèsent pour 90 kg, et le collier seul, 40 kg[4].
Albert Maumené cite le standard de la race tel qu'il est établi en 1930[20]. La tête est de taille moyenne, avec un front large et un chanfrein très légèrement creux[20]. Les oreilles grandes et souvent bien plantées[20], sont proches de celles du Percheron[4]. L'encolure est d'une longueur moyenne, musclée et peu relevée[20]. La crinière est peu fournie, et tombe généralement d'un seul côté de l'encolure (crinière simple)[20]. Le poitrail est large et descendu, le garrot bien dessiné[20]. Les angles d'attaches des cuisses et des épaules permettent les allures allongées[20]. Le rein est puissant, la croupe longue et musclée[20], peu inclinée, souvent double et masquant les hanches, en particulier si eux le corps est trapu et épais[4]. La queue, fournie, est attachée haut[20]. Les crins sont soyeux[20]. L'Augeron a « de la branche, du corps, de la longueur de hanche », mais il est quelquefois un peu décousu d'après Louis Moll et Eugène Gayot[22]. Si Jean-Henri Magne dit que ce cheval est porté « par des membres bien plantés et très solides »[4], et si le standard les demande « puissants »[20], pour Eugène Gayot, les membres de l'Augeron ne répondent pas toujours au volume de l'animal, ni ses allures à sa beauté[22]. Genoux et jarrets sont larges et près de terre[20]. Le canon est large et court, avec des paturons souples[20]. Les fanons sont quasiment absents[4],[20]. Les pieds doivent être bien développés, pour supporter le poids de l'animal[20].
Robe
[modifier | modifier le code]D'après Magne, la robe est le plus souvent « blanche ou grise »[4]. Les robes grises ou noires sont admises par le standard de race[20].
Tempérament et entretien
[modifier | modifier le code]« Aussi intelligent que fort », le cheval Augeron peut présenter des différences en fonction de sa région d'origine exacte. Ceux qui viennent des rives de la Vire sont remarquables par leur force et leur sobriété : élevés dans des contrées moins fertiles, ils sont moins exigeants que ceux du Bessin et des riches vallées de Lisieux[4]. Ces chevaux sont élevés en extérieur toute l'année, l'hiver étant court et peu rigoureux[20].
Utilisations
[modifier | modifier le code]Jean-Henri Magne les qualifie d'« excellents chevaux »[4]. De par ses aptitudes, l'Augeron est apprécié à l'attelage[22], particulièrement par les marchands, au gros transport à allures vives[4]. Ces chevaux occupent souvent le brancard d'énormes voitures sur lesquelles sont transportés des blocs de pierre de taille de 10 000 kg à 15 000 kg, ils sont « aussi habiles à manœuvrer dans les tournants que solides pour résister aux secousses écrasantes de ces charges vraiment monstrueuses »[4].
Les éleveurs de chevaux Augerons font souvent labourer les champs par les poulains dans leur jeunesse, avant de les vendre au commerce ou à l'étranger[4],[18], en particulier les mâles. Ils gardent généralement les femelles pour l'élevage[5].
Par croisement avec des étalons Pur-sang et Bai de Cleveland, l'Augeron est à l'origine de la race du carrossier Anglo-normand de la plaine de Caen[23].
Diffusion de l'élevage
[modifier | modifier le code]L'Augeron est historiquement élevé dans le pays d'Auge, dont plusieurs cantons se trouvent dans le Calvados[24], son principal centre de production. Son élevage est relativement disséminé[5] et s’étend jusque dans une partie des départements de l'Eure et de la Manche. Mais c’est notamment dans le Calvados qu’il est répandu, c’est-à-dire dans les vallées des arrondissements de Lisieux et de Pont-l'Évêque, mais aussi dans le Bessin, près de Livarot, de Falaise et de Caen. Sinon, on le trouve un peu dans l’Eure vers Bernay et Pont-Audemer[1],[5],[25]. Autour de Caen, les éleveurs donnent la préférence au cheval de trait ou au cheval de selle en fonction de la rentabilité[5]. L'élevage du cheval est facilité par le terrain d'alluvions, argileux et riche, permettant la pousse d'une herbe nutritive[20].
La race est mentionnée comme éteinte (statut « X ») sur l'évaluation de la FAO publiée en 2007[26]. L'ouvrage de référence de CAB International (6e édition de 2020) référence la race comme éteinte, sous le nom d'« Augeron »[2].
Notes et références
[modifier | modifier le code]- Mavré 2004, p. 26.
- (en) Valerie Porter, Mason's World Dictionary of Livestock Breeds, Types and Varieties, CAB International, , 6e éd., 448 p. (ISBN 1-78924-153-7), p. 181..
- Paul Diffloth, Zootechnie générale : production et alimentation du bétail. Zootechnie spéciale; cheval, âne, mulet, J.-B. Baillière et fils, coll. « Encyclopédie agricole », , p. 352.
- Magne 1857, p. 260.
- Magne 1857, p. 261.
- Hippolyte Constant Charles, Histoire du cheval boulonnais, Aux bureaux de la France chevaline, (lire en ligne), p. 153-154.
- Georges Bonnefont, Élevage et dressage du cheval, Paris, J.-B. Baillière et fils, (lire en ligne), p. 72.
- Académie d'agriculture de France, Comptes rendus, vol. XXXIX, Académie, , p. 342.
- H. Vallé de Loncey, Les races de chevaux de trait (France, Belgique, Angleterre), Bureaux de L'Acclimatation, , p. 368.
- Louis Gossin, L'agriculture française (etc.), Lacroix et Baudry, (lire en ligne), p. 316-317.
- Daniel Faucher, La France, géographie-tourisme, vol. II, Librairie Larousse, , p. 120.
- Mavré 2004, p. 44.
- Marie Cegarra, L'animal inventé : ethnographie d'un bestiaire familier, Paris, L'Harmattan, , 189 p. (ISBN 978-2-7384-8134-4, présentation en ligne), p. 83.
- Bernadette Lizet, « Le sang sous la masse, enjeux de l'émergence d'une race chevaline de gros trait dans la Nièvre », Terrain, Ministère de la culture / Maison des sciences de l’homme, no 10, , p. 8-22 (lire en ligne).
- Annick Audiot, Races d'hier pour l'élevage de demain : Espaces ruraux, Éditions Quae, , 230 p. (ISBN 978-2-7380-0581-6, présentation en ligne), p. 86.
- (en) Valerie Porter, Lawrence Alderson, Stephen J. G. Hall et Dan Phillip Sponenberg, Mason's World Encyclopedia of Livestock Breeds and Breeding, CAB International, , 6e éd., 1 107 p. (ISBN 1-84593-466-0, OCLC 948839453), p. 491..
- Bernadette Lizet, « Rapport Chevaux de trait : le retour ? Aperçus régionaux en Basse-Normandie, fiche n°5 », Hippotese (consulté le ).
- Dechambre 1928, p. 114.
- Emile Levasseur, La France et ses colonies (géographie et statistique), vol. II, C. Delagrave, coll. « La France et ses colonies », , p. 124.
- Maumené 1930, p. 8.
- X. de Nabat, « Race augeronne », L'Argus des haras et des remontes : journal de la réforme des abus dans l'intérêt des éleveurs de chevaux, de la cavalerie et de l'agriculture, , p. 724 (lire en ligne sur Gallica, consulté le ).
- Moll et Gayot 1861, p. 39.
- Antoine-Alexandre Vial, Connaissance pratique du cheval : traité d'hippologie à l'usage des sportsmen, officiers de cavalerie..., Paris, Librairie agricole de la maison rustique, , 3e éd. (lire en ligne), p. 195
- J. Jacoulet et Claude Chomel, Traité d'Hippologie, vol. II, S. Milon fils, , p. 491.
- Maumené 1930, p. 7.
- (en) « Breeds Currently Recorded In The Global Databank For Animal Genetic Resources » [PDF], Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture, .
Annexes
[modifier | modifier le code]Bibliographie
[modifier | modifier le code]: document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.
Sources anciennes
[modifier | modifier le code]- [Dechambre 1928] Paul Dechambre, Traité de zootechnie : Les équidés, vol. 2 de Traité de zootechnie, Librairie agricole de la maison rustique,
- [Magne 1857] Jean Henri Magne, Hygiène vétérinaire appliquée : Étude de nos races d'animaux domestiques et des moyens de les améliorer, vol. I, Labe, (lire en ligne).
- [Maumené 1930] Albert Maumené, « Le cheval de trait Augeron, Percheron modifié », La vie à la campagne, vol. LXV, , p. 7 (lire en ligne)
- [Moll et Gayot 1861] Louis Moll et Eugène Nicolas Gayot, La connaissance générale du cheval : études de zootechnie pratique, avec un atlas de 160 pages et de 103 figures, Didot, , 722 p. (lire en ligne).
Articles et études récentes
[modifier | modifier le code]- [Hodiesne 2012] Jacques Hodiesne, « Le Trait Augeron », Le Pays d'Auge, no 1,
- [Mavré 2004] Marcel Mavré, Attelages et attelées : un siècle d'utilisation du cheval de trait, France Agricole Éditions, , 223 p. (ISBN 978-2-85557-115-7, présentation en ligne).