Crise migratoire à Melilla en 2022 — Wikipédia
Crise migratoire à Melilla | |
Manifestation dénonçant la crise migratoire à Melilla le dimanche 26 à 18 h 00 à Callao. | |
Pays | Espagne et Maroc |
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Localisation | Barrière de Melilla |
Coordonnées | 35° 17′ 11″ nord, 2° 57′ 43″ ouest |
Cause | Franchissement massif de la frontière, considéré comme une immigration illégale par les forces de sécurité |
Date | |
Bilan | |
Blessés | 76 (officiel) |
Morts | au moins 23 selon les autorités marocaines, au moins 37 selon les ONG locales, Amnesty International, et les experts indépendants du Conseil des droits de l’homme des Nations unies |
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La crise migratoire à Melilla en 2022 aussi appelée le Drame de Melilla fait suite à la tentative de traversée illégale de la frontière entre le Maroc et l'Espagne le par près de 2 000 migrants. Une trentaine d'entre eux meurent dans la bousculade et du fait de ce que l’ONU a qualifié d'« usage excessif de la force » contre des migrants. L’événement se produit un an après un drame similaire à Ceuta. En décembre 2022, l'enquête des autorités espagnoles est classée sans suite.
Contexte
[modifier | modifier le code]Le drame s'inscrit dans une longue suite d'événements tragiques qui a comme lieu les enclaves espagnoles de Ceuta et Melilla. Dans le référent collectif on compte aussi la tragédie du Tarajal de 2014 à Ceuta. La situation actuelle aux enclaves espagnoles, comme aux îles grecques ou italiennes, fait resurgir toutes les contradictions de la politique migratoire de l'Union européenne[1].
Déroulement
[modifier | modifier le code]Drame
[modifier | modifier le code]L'incident s'est produit le matin du 24 juin de 2022 à Melilla, quand environ 2 000 migrants en provenance du Maroc, majoritairement des Soudanais[2] fuyant le conflit au Darfour[3], ont tenté d'attaquer et de franchir la barrière frontalière de Melilla, qui sépare l'enclave espagnole du nord de l'Afrique au royaume du Maroc[4],[5],[6].
Les forces de sécurité des deux pays tentent de disperser la foule mais engagent de violents combats avec les migrants pendant deux heures. Des responsables espagnols et marocains ont déclaré que leurs gardes-frontières avaient été agressés avec des armes par des migrants et avaient dû riposter en état de légitime défense[7]. Selon les autorités, les migrants en fuite se sont piétinés, provoquant une bousculade humaine et tuant plusieurs personnes[8]. Plusieurs autres migrants sont tombés de la clôture sur le sol[9]. Au moins 18 migrants ont été tués, dont cinq sont morts lors de la tentative de traversée et treize sont morts des suites de leurs blessures à l'hôpital[10].
Bilan
[modifier | modifier le code]Une trentaine de migrants meurent « dans des bousculades et en chutant de la clôture de fer », selon les autorités marocaines[11],[12]. Celles-ci estiment que le bilan des victimes s'élève à 23 migrants et 2 gendarmes morts ainsi qu'à 76 migrants et 140 gendarmes blessés[4],[13].
Par contre, les organisations non gouvernementales présentes sur le territoire estiment qu'au moins 37 migrants sont morts. Ces mêmes organisations réclament des enquêtes pour déterminer s'il y a eu un usage disproportionné de la force par les forces de police marocaines[14],[13].
133 migrants réussissent à entrer à Melilla et sont placés en centre de rétention[12].
Réactions
[modifier | modifier le code]Autorités du Maroc
[modifier | modifier le code]Selon les autorités marocaines, les victimes ont péri à la suite de bousculades et de chutes en tentant d'outrepasser la barrière séparant l'enclave de Melilla du territoire marocain, cet assaut fut marqué "par l’usage de méthodes très violentes de la part des migrants"[15].
Autorités de l'Espagne
[modifier | modifier le code]Le Président du gouvernement espagnol Pedro Sánchez a déclaré que l'incident était une « agression violente et bien organisée » par des groupes criminels organisés et a remercié les forces de sécurité espagnoles et marocaines pour leurs actions[16].
Le parti Unidas Podemos et plusieurs formations politiques soutenant le gouvernement, telles que la Gauche républicaine de Catalogne, EH Bildu et le Bloc nationaliste galicien ont demandé au Parlement la constitution d’une commission d’enquête sur ces évènements. Le député Enrique Santiago a déclaré qu'« il n’y a aucun doute que la bousculade qui a provoqué les morts et les blessés les plus graves a eu lieu dans une zone sous contrôle de l’autorité espagnole », soulignant notamment l’importance de « déterminer pourquoi il n’y a pas eu de soins médicaux durant les deux ou trois heures suivantes, durant lesquelles il aurait été possible de sauver des vies »[17].
Presse
[modifier | modifier le code]Ces événements ont été peu relayés par les chaines de télévision et de radio ainsi que par la presse écrite. En revanche, les réseaux sociaux se sont enflammés de vidéos et photographies de plusieurs migrants inconscients, blessés, entassés ou morts. Officiellement en situation de garde à vue, les images sont fort troublantes[6],[18],[19].
La BBC début novembre 2022 un documentaire contredisant la version du gouvernement espagnol, selon laquelle il n’y a eu aucun mort du côté espagnol. La Garde civile espagnole se serait ainsi abstenue de porter secours à des personnes en danger, les laissant étouffer contre le bâtiment, fermé, des douanes. D'autre part, des corps se trouvant sur son territoire auraient été transférés du côté marocain[17].
Association marocaine des droits de l'homme, ONU
[modifier | modifier le code]L'Association marocaine des droits de l'homme a accusé les autorités marocaines de tenter de dissimuler les décès, notant que six jours après la tragédie, aucune autopsie n'avait été pratiquée et qu'aucun effort n'avait été fait pour identifier les personnes tuées[3]. L’ONU dénonce « un usage excessif de la force » contre des migrants[20], et Amnesty qualifie le drame de « tuerie de masse » et accuse le Maroc et l'Espagne de « couvrir leurs meurtres » en « dissimulant » la vérité[21].
Suites judiciaires
[modifier | modifier le code]La justice marocaine poursuit 65 migrants, principalement Soudanais, pour avoir participé à la tentative de passage[22]. Le , trente-trois hommes sont condamnés à onze mois de prison[23].
L’enquête ouverte par la justice espagnole est classée sans suite en décembre 2022, faute d’éléments contre les forces de l’ordre espagnoles[21].
Références
[modifier | modifier le code]- (en) Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Wikipédia en anglais intitulé « 2022 Melilla incident » (voir la liste des auteurs).
- (en) Michaela Pelican et Sofie Steinberger, « Melilla: Perspectives on a border town », Cologne Working Papers in Cultural and Social Anthropology, Institut Für Ethnologie, Universität zu Köln, no 6,
- « Melilla : entre les autorités et les migrants, la bataille des récits », La Croix, (ISSN 0242-6056, lire en ligne, consulté le )
- (en) « ‘A bloodbath’: refugees reel from deadly Melilla mass crossing », sur the Guardian, (consulté le )
- (en) Agence France-Presse, « Melilla: death toll from mass incursion on Spanish enclave rises to 23 », sur The Guardian, (consulté le )
- « Drame de Melilla : les responsabilités pointées du doigt », sur Africa News, (consulté le )
- (es) Peregil, « La tragedia bajo la valla de Melilla que nadie pudo tapar en Marruecos », sur El País, (consulté le )
- (en) « Dozens of migrants piled together at Melilla border fence », sur Reuters,
- (en) « Melilla: death toll from mass incursion on Spanish enclave rises to 23 », sur The Guardian,
- (en) « Spain calls deadly migrant rush an 'attack' on its territory », sur France 24,
- (en) « Morocco: 18 migrants dead in stampede to enter Melilla », sur ABC News,
- « Drame dans l’enclave espagnole de Melilla au Maroc : nouveau bilan de 23 migrants morts », Le Monde.fr, (lire en ligne, consulté le )
- « Drame de Melilla : comment une tentative d’entrée en Europe a conduit à la mort de dizaines de migrants », Le Monde.fr, (lire en ligne, consulté le )
- (es) EFE, « Las ONG elevan a 37 los migrantes muertos en su intento de saltar la valla de Melilla », sur El Diario, (consulté le )
- Aurélie Collas et Sandrine Morel, « A Melilla, une tentative d’entrée de migrants tourne au drame », sur Lemonde.fr, (consulté le )
- « Mort de 23 migrants à Mellila, l'Espagne accuse "les mafias" de passeurs », sur Le Huffington Post, (consulté le )
- « Immigration : le drame de Melilla est «une attaque contre l'intégrité territoriale» de l'Espagne, selon Pedro Sánchez », sur LEFIGARO,
- « Le gouvernement espagnol sous pression de ses alliés politiques après la mort de 23 migrants à Melilla », Le Monde.fr, (lire en ligne)
- (en) Ahmed Eljechtimi et Graham Keeley, « Dozens of migrants piled together at Melilla border fence », Reuters, (lire en ligne, consulté le )
- (ca) « La carnisseria d’immigrants a Melilla es gira contra el govern espanyol », sur El Món, (consulté le )
- « Emotion et controverses après le drame de Melilla, dans le nord du Maroc », Le Monde.fr, (lire en ligne, consulté le )
- « En Espagne, l’enquête sur la mort d’au moins 23 migrants africains à Melilla classée sans suite », Le Monde.fr, (lire en ligne, consulté le )
- « Rabat poursuit des migrants impliqués dans le drame de Melilla » [audio], sur VOA (consulté le )
- (en-US) Aida Alami, « Migrants in Morocco Are Sentenced in Attempt to Cross Into Spanish Enclave », The New York Times, (ISSN 0362-4331, lire en ligne, consulté le )