Joca monachorum — Wikipédia
Les Joca (ou Ioca) monachorum, littéralement « passe-temps des moines » [1], ou « plaisanteries de moines » [2], était un genre de devinette amusante qui avait cours parmi les moines chrétiens. Elles portaient généralement sur des sujets bibliques, mais certaines avaient comme thème la littérature, la philosophie ou l’histoire. Bien qu’elles puissent être de simples questions (exemple 2 ci-après), elles pouvaient aussi se présenter sous forme d’énigmes (exemple 3) ou de plaisanteries (exemple 1). Elles servaient probablement à favoriser la mémorisation et à stimuler l’esprit[3],[4].
Popularité
[modifier | modifier le code]Le genre fit ses débuts dans l’Orient grec, mais se répandit par la suite dans la chrétienté[1],[3]. Au VIe siècle il avait atteint la Gaule et les Iles britanniques[4]. On en trouve des exemples en latin, en allemand, en suédois, en occitan, en catalan et en castillan[5]. Le genre survécut jusqu’à la fin du Moyen-Âge. Son équivalent moderne serait le jeu connu sous le nom de « Trivial Pursuit »[N 1]. Charles Wright donne comme exemple le genre de devinette : « Qui fut le premier à jouer au tennis dans la Bible ? -- Moïse puisqu’il servit à la cour de Pharaon »[2],[N 2].
Description
[modifier | modifier le code]Le même « joca » peut se retrouver dans plusieurs manuscrits. Les réponses sont généralement courtes, quelques fois même un simple nom[5], mais on peut trouver des réponses plus longues. La Table franque des peuples contint les réponses à une série de huit « joca »[1]. L’Ancien Testament est une source de questions particulièrement prisée[5] pour les questions du genre « Qui fut le premier à… ? » [2]. Celui qui pose la question et celui qui y répond sont parfois identifiés dans le texte, parfois non[5]. Ces questions sont généralement précédées des expressions dic mihi (dites-moi), dico tibi (je vous dis), interrogatio (question) ou responsio (réponse) et, dans les derniers dialogues, discipulus (étudiant) et magister (professeur). Dans un groupe de joca, on trouve comme interlocuteurs les noms de l’empereur Hadrien et du philosophe Epictète[2].
Exemples
[modifier | modifier le code]- Qui mourut sans être né ? Adam. Qui naquit, mais ne mourut pas ? Élie et Énoch[3].
- Qui tua Holopherne, le général en chef des armées de Nabuchodonosor ? Judith[1].
- Qui fit perdre sa virginité à sa grand-mère ? Caïn et la terre[2].
Bibliographie
[modifier | modifier le code]- (en) Goffart, Walter. "The Supposedly 'Frankish' Table of Nations: An Edition and Study", (in) Frühmittelalterliche Studien 17 (1983) pp. 98–130, esp. at 128–130.
- (en) Wright, Charles D. "From Monks' Jokes to Sages' Wisdom: The Joca Monachorum Tradition and the Irish Immacallam in dá Thúarad", (in) Mary Garrison, Arpad P. Orbán and Marco Mostert (eds.) Spoken and Written Language: Relations between Latin and the Vernacular Languages in the Earlier Middle Ages. Brepols, 2013, pp. 199–225.
- (en) "Joca (Ioca) monachorum" (in) Robert E. Bjork (ed.), The Oxford Dictionary of the Middle Ages, Oxford University Press, 2010. Recherche 17 March 2020.
- (fr) Dubois, Jacques. "Comment lest moines du moyen âge chantaient et goutâient les Sainte Écritures", (in) Pierre Riché and Guy Lobrichon (eds.), Le Moyen Âge et la Bible, Beauchesne, 1984, pp. 264–270.
- (en) Wahlgren, Erik. "A Swedish-Latin Parallel to the Joca Monachorum", Modern Philology 36 (1939) pp. 239–245.
- (fr) P. M., "Joca monachorum (Texte du VIe siècle (?) écrit au VIIIe)", in Romania, 4 (1872) pp. 483-490. https://www.persee.fr/doc/roma_0035-8029_1872_num_1_4_6609
Notes et références
[modifier | modifier le code]- (en) Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Wikipédia en anglais intitulé « Ioca monachorum » (voir la liste des auteurs).
Notes
[modifier | modifier le code]- Ce jeu fut conçu au Québec en 1981 et portait à l’origine le nom de « Quelques arpents de piège ». Il fut ensuite commercialisé en France sous le nom « Remue-méninges » avant de connaître le succès sous le nom de sa marque de commerce : Trivial Pursuit
- Traduction imparfaite en raison de la différence en français entre « la cour du roi » et « le court de tennis »
Références
[modifier | modifier le code]- Goffart (1983) pp. 98-130, spécialement 128-130
- Wright (2013) pp. 199-225
- Oxford Dictionary, « Joca monachorum »
- Dubois (1984) pp. 264-270
- Wahlgren (1939) pp. 239-245