Mytiliculture — Wikipédia

Bateau à fond plat d'ostréiculteurs bretons.

La mytiliculture est l'élevage des mollusques filtreurs de la famille des Mytilidae dénommés « moules », plus précisément des « moules marines » (les « moules d'eau douce », espèce menacée, ne faisant pas l'objet d'élevage, mais plutôt de protection et réintroduction).

Méthodes d'élevage

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Bouchots en baie de Wissant dans la Manche, Pas de Calais, France

Trois espèces sont principalement exploitées en mytiliculture : Mytilus edulis sur les côtes atlantiques, les côtes bretonnes, dans tout le nord de l'Europe, ainsi qu'au Canada, Mytilus galloprovincialis sur les côtes méditerranéennes, espagnoles, portugaises et atlantiques, et Mytilus platensis sur les côtes du Chili. Les bancs de moules, qu'ils soient naturels ou exploités, sont nommés « moulières ». Plus de 700 000 t de moules sont produites en Europe par an, avec une baisse régulière de production depuis 1999[1].

Les principales techniques d'élevage sont les suivantes :

  • bouchots : des poteaux verticaux en bois ou en plastique enfoncés sur l'estran, autour desquels on enroule des cordes en fibres de coco qui ont servi de capteur pour le naissain de moules. On ajoute à mi-élevage un filet (nommé « catin ») qui empêche les moules de se décrocher, les grappes de moules les moins bien accrochées sont récupérées et remises dans un filet tubulaire pour faire des "boudins" qui sont remis en élevage sur un nouveau pieu (photo de gauche). Cette technique nécessite un fort marnage (hauteur entre la haute et la basse mer), car les poteaux doivent être couverts à marée haute et accessibles pour le professionnel à marée basse.
  • filières : élevage en suspension, une corde principale est maintenue en surface par des bouées sur une centaine de mètres, les deux extrémités sont fixées au fond par des ancres. Des cordes lestées à l'extrémité sont fixées à la corde principale, et des cordes de coco support des naissains de moule sont enroulées autour des suspensions. L'avantage de cette technique réside dans le fait que les moules sont dans l'eau continuellement et peuvent donc s'alimenter sans interruption, l'inconvénient principal est la prédation par les daurades.
  • suspension sous table : pratiquée dans l'étang de Thau, et en Méditerranée c'est la technique des tables d'élevage.
  • suspension sous radeau : pratiquée en Espagne, c'est la technique des (es) bateas.

Mytiliculture et environnement

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La mytiliculture entretient diverses relations à l'environnement :

  • les moules nécessitent une eau d'une qualité suffisante, surtout pour être commercialisées (qualités organoleptiques, chimiques, biologiques, teneur en plancton et nutriments vitaux, faible teneur en polluants, etc.). Certaines espèces peuvent parasiter ou consommer des moules. Les mytiliculteurs cherchent à s'en prémunir.
  • Inversement, les élevages de moules peuvent avoir des conséquences sur l'environnement ; positives via la filtration de l'eau, mais localement parfois négatives par l'occupation ou l'artificialisation d'habitats qui ne sont plus disponibles pour d'autres espèces, et surtout via une augmentation de la teneur de l'eau en certaines particules (dont excréments (feces, pseudofeces des moules) qui par le phénomène de « biodéposition » modifient l'environnement local.
    Une étude récente a montré que la nature et la quantité de la biodéposition variait fortement selon les saisons et le courant ou le coefficient de marée, par contre la biodéposition sur le milieu sestonique parait toujours circonscrite à une zone de superficie restreinte ; Si à 100 mètres des filières d'élevages de moules, les concentrations sestoniques sont « similaires à celles observées sous les filières », à 400 mètres elles sont devenues très faibles par rapport à celles mesurées dans la zone des 100 mètres autour des filières[2]

Espèces exploitées

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Élevage de moules sur pieux dans la rivière de Daoulas dans le Finistère (Bretagne)

Données économiques

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Dans la baie du Mont Saint-Michel les mytiliculteurs utilisent des barges amphibies.

Production mondiale

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Au niveau mondial, certaines sources estiment que la production de la mytilus edulis est de 200 000 tonnes[4]ou de 400 000 tonnes. Une autre source fiable mentionne 1,6 million de tonnes[5]. En Europe, c'est l'Espagne qui produit le plus de moules avec 260 000 tonnes[6].

Production en tonnes (chiffres 2003)
Données de FAOSTAT (FAO)

Chine 683 237 43,0 % 1er
Espagne 248 827 15,6 % 2e
Italie 100 000 6,3 % 3e
France 68 000 4,3 % 6e
Autres pays 489 400 30,8 %
Total 1 589 464 100 %

Production française

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Avec une production de 68 000 tonnes par an, la France se place au 6e rang mondial et en 3e position en Europe. La consommation française (100 000 tonnes par an) est en partie assurée par des importations des Pays-Bas, d'Irlande et d'Espagne[7].

Les valeurs de production indiquées ci-après sont des estimations communiquées par les Comités Régionaux de la Conchyliculture et rapportés par le Comité National de la Conchyliculture[8].

Production par région 2015/2016 (en tonnes)
Région Moules de Bouchot Autres moules Total
Normandie-Mer du Nord 21000 700 21700
Bretagne Nord 17494 17494
Bretagne Sud 3500 3500
Pays de la Loire(*) 10000 - 10000
Poitou-Charentes 4000 1200 5200
Méditerranée(*) - 30000 30000
TOTAL 87894

(*) Chiffres de 2011/2012

Pathologies

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Le mytiliculteur est confronté à des prédateurs naturels de la moule tels que certains oiseaux marins, des bigorneaux perceurs (nucelles, pouvant eux-mêmes être commercialement valorisés[9]).

Le fait que les élevages forment des colonies artificielles très denses (parfois en aval d'estuaires ou de bouchon vaseux pollués) peut y favoriser le développement de certains parasites et la diffusion dans les élevages de microbes pathogènes (bactéries, virus, vibrions...).

Le mytiliculteur est aussi de plus en plus confrontés à des espèces introduites devenues invasives (animales telle que l'ascidie Styela clava[10] ou, en Europe, l'algue Sargasse).

La moule (comme d'autres mollusques marins) pouvant aussi héberger des pathogènes pour l'homme ou des toxines bactériennes, elle fait l'objet d'un suivi épidémiologique (en France avec d'aide d'Ifremer)[11].

Parmi les parasites ou microbes préoccupants figurent :

Autres maladies :

  • la néoplasie hémocytaire des mollusques (ou leucémie des mollusques ou leucémie hémocytaire des mollusques), maladie pour laquelle environ 15 espèces vulnérables étaient déjà référencées par Perters (en 1988) dans le monde[21]). Cette maladie, encore mal comprise, parfois et de plus en plus souvent mortelle pour la moule, est caractérisée par une hypertrophie du noyau des cellules sanguines.
    Sa prévalence était autrefois faible (moins de 5 % des colonies de moules), puis est devenue localement massives (80 % à 100 % de mortalité)[22]. Plusieurs facteurs environnementaux, tels la pollution de l'eau semblent favoriser la maladie, sans a priori en être l'origine[23]. Depuis 2014 des mortalités localement importantes (près de 100 %) certaines zones de mytilicultures françaises. Une forme maladie émergente (apparentée à un cancer de type leucémique, parfois dénommée Leucémie des mollusques[24], mais qui serait transmissible d'une moule à l'autre, et toujours associé à des désordres chromosomiques encore mal compris). Cette maladie a d'abord identifiée aux États-Unis est maintenant cause de mortalités sur la façade atlantique du littoral français selon une étude publiée en 2016 par le Journal of Invertebrate Pathology[25]. La maladie est considérée comme transmissible.

Notes et références

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  1. data sur dataservice.eea.europa.eu.
  2. « La biodéposition des moules, Mytilus edulis, du Pertuis Breton : influence du cycle de marée et impact spatial »(Archive.orgWikiwixArchive.isGoogleQue faire ?), par Elodie Kerambrun pour le centre de Recherche sur les Ecosystèmes Littoraux Anthropisés (CRELA/CNRS UMR6217).
  3. Conchyliculture des bivalves
  4. Statistiques FAO
  5. Ifremer statistiques mytiliculture.
  6. Site PleinerMer.com.
  7. Solène Le Roux, « La conchyliculture défend sa légitimité », dans Les Échos, supplément au numéro 19 561 du 14 décembre 2005.
  8. « Comité de National Conchyliculture », sur cnc-france.com (consulté le ).
  9. Les nucelles, un produit aux multiples valorisations ; Publié le 2 juillet 2015, consulté 2016-06-18.
  10. Robichaud, L. M. (2008). Influence de la mytiliculture et de l'ascidie envahissante styela clava sur les communautés de macroinvertébrés benthiques à l'Île-du-Prince-Édouard (Vol. 1009). ProQuest.
  11. Jean, P., & Coralie, L. (2014). Chronologie de l’alerte épidémiologique en mytiliculture en 2014: les faits et les perceptions. Journées de la Surveillance de la santé des mollusques marins, 15-17.
  12. Bower S.M, S.E McGladdery, I.M. Pice (1994) «Synopsis of infectious diseases and parasites of commercially exploited shellfish.» Annual Review of Fish Diseases 4: 1-199 ; MAPAQ, DIT, Rapport de R-D n° 159.
  13. LeBreton, J., & Lubert, P. (1992, January). Résultats d'une intervention sur une parasitose a Proctoeces maculatus (Trematoda, Digenea) affectant la mytiliculture de l'ouest Cotentin. In Les Mollusques Marins: Biologie et Aquaculture, Brest (France), 9 Nov 1990.
  14. Mytilicola instestinalis : présence contrastée, SMEL , Publié le 1 janvier 2011.
  15. Abelson A (1994) « Hydrodynamic impediments to settlement of marine propagules, and adhesive-filament solutions » Limnol. Oceanogr. 39 (1): 164-169.
  16. da Silva, P.M, A.R.M Magalhaes & M.A Barracco (2002) « Effects of Bucephalus sp. (Trematoda: Bucephalidae) on Perna perna mussels from a culture station in Ratones Grande Island, Brazil » Journal of Invertebrate Pathology 79 (3): 154-162.
  17. a et b Bower, S.M & Figueras A.J (1989) « Infectious diseases of mussels, especially pertaining to mussel transplantation.» World aquaculture 20 (4): 89-93.
  18. Coustau C, Combes Cn Maillard C, Renaud F, Delay B (1990) Prosorhynchus squamatus (Trematoda) parasitosis in the Mytilus edulis-Mytilus galloprovincialis complex : Specificity and host-parasite relationships. In « Pathology in Marine Science ». A. Press. San Diego:291-298.
  19. Bower S.M & McGladerry S.E. (2003) Synopsis of infectious diseases and parasites of commercially exploited shellfish.
  20. McGladdery S.E & Stephenson MF (2002) « Le programme de santé des mollusques des maritimes et son rôle dans la conchyliculture et la surveillance environnementale» 1-10.
  21. Perters E.C. (1988) « Recebt investigations on the disseminated sacromas of marine bivalve molluscs» American Fisheries Society Special Publication. 38: 45-51.
  22. Elston, R.A., J.D. Moore, K. Brooks. (1992) « Disseminated neoplasia of bivalve molluscs .» Reviews in Aquatic Sciences 6: 405-466.
  23. Smolarz K, Thiriot-Quievreux C & al. (2005) « Recent trends in the prevalence of neoplasia in the Baltic clam Macoma balthica (L.) from the Gulf of Gdansk (Baltic Sea).» Oceanologia 47: 61-74.
  24. Sonia, Belvin Sharon & McGladdery, Benoit Thomas (2007), Répartition des pathogènes de différentes populations de moules de gisements naturels du Québec publications de la Direction de l’innovation et des technologies ; Le Rapport de recherche-développement N°159 ; PDF, 24 pp ; ISBN (version imprimée) : 978-2-550-50382-8 ; ISBN (version PDF) : 978-2-550-50383-5.
  25. Benabdelmouna A & Ledu C (2016) The mass mortality of blue mussels (Mytilus spp.) from the Atlantic coast of France is associated with heavy genomic abnormalities as evidenced by flow cytometry ; Journal of Invertebrate Pathology, volume 138, July 2016, Pages 30–38 ; doi:10.1016/j.jip.2016.06.001 (résumé).

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Bibliographie

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  • Audouin, J. (1954). https://archimer.ifremer.fr/doc/00003/11464/8024.pdf La mytiliculture en Baie de l'Aiguillon]. Science et Pêche, (16), 8–10.
  • Bardot-Cambot, A., & Forest, V. (2013). Ostréiculture et mytiliculture à l'époque romaine? Des définitions modernes à l'épreuve de l'archéologie. Revue archéologique, (2), 367-388 (résumé).
  • Bompais, X., Dardignac, M. J., & Piclet, G. (1991). Les filières pour l'élevage des moules (guide pratique) (http://cat.inist.fr/?aModele=afficheN&cpsidt=107405 Notice Inist-CNRS]).
  • Brien, Y. (1974). Goélands et mytiliculture dans les Côtes-du-Nord. Société pour l'étude et la protection de la nature en Bretagne.
  • Dardignac, M. J. (2004, October). http://archimer.ifremer.fr/doc/2004/publication-1911.pdf La mytiliculture dans le" Pertuis Breton": synthèse des travaux réalises de 1980 a 1992]. In Annales de la Société des sciences naturelles de la Charente-Maritime (pp. 3-79). Société des sciences naturelles de la Charente-Maritime.
  • Davaine, A. (2002). La mytiliculture en baie du Mont-Saint-Michel: analyse économique du secteur et de ses interactions avec le milieu, les autres secteurs d’activité et l’environnement institutionnel. Mémoire de DESS Économie et Environnement.
  • Guyondet, T. (2011). Mytiliculture Et Écosystème Côtier: Modélisation Intégrée de Leurs Interactions Dans la Lagune de Grande-Entrée, Îles-de-la-Madeleine, Québec. Library and Archives Canada= Bibliothèque et Archives Canada.
  • Lambert, L. (1951). L'ostréiculture et la mytiliculture en Zélande (Pays-Bas). Revue des Travaux de l'Institut des Pêches Maritimes, 16(61-64), 111-128.
  • Loste, C. (1995). Approche des couts de production et des marges des entreprises de mytiliculture sur filieres en Languedoc-Roussillon (France). Cahiers Options Mediterraneennes (CIHEAM). v. 14 (résumé)
  • Rodriguez, J. (2013). Performances d'élevage de la moule (Mytilus edulis) en Manche/Atlantique. Recensement et interprétation. 1: Synthèse et rapport (Lien - Archimer/Ifremer).
  • Roy, S., Mayzaud, P., & Souchu, P. (1991). Environnement physico-chimique et trophique d'un site mytilicole, îles-de-la-Madeleine (Québec): II-Matière particulaire, composition biochimique et productivité primaire. Le golfe du Saint-Laurent: petit océan ou grand estuaire, 113.
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Articles connexes

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