Nouméa — Wikipédia
Nouméa (prononcé /nu.me.a/), principale ville portuaire de Nouvelle-Calédonie, est le chef-lieu de cette collectivité d'outre-mer française au statut spécifique et de la Province Sud, située sur une presqu'île de la côte sud-ouest à l’est de la Grande Terre.
D'importance moyenne à l'échelle française (94 285 habitants en 2019), même en comptabilisant sa banlieue et sa couronne périurbaine (182 341 habitants), Nouméa est la plus grande ville francophone d'Océanie devant Papeete, et l'une des plus importantes de la France d'outre-mer (la troisième, après Saint-Denis et Saint-Paul de La Réunion). Elle est la 46e commune la plus peuplée en France et le Grand Nouméa correspond à la 53e aire urbaine française (la quatrième d'outre-mer, après celles de Pointe-à-Pitre-Les Abymes en Guadeloupe, de Mamoudzou à Mayotte et de Saint-Denis à La Réunion).
Créée en 1854 sous le nom de Port-de-France pour servir de centre administratif et militaire à la colonisation française en Nouvelle-Calédonie, elle prend le nom « Nouméa », d'origine kanak mais à l'étymologie incertaine, le . Elle s'est développée avec la colonisation, notamment du fait de la présence du bagne, mais aussi grâce à l'activité minière depuis les années 1870. Celle-ci est dominée par l'extraction du nickel et a connu plusieurs « boom » (surtout dans les années 1960 et 2000). Longtemps liée au pouvoir colonial et très européenne, elle est surnommée par les premiers indépendantistes « Nouméa la blanche » dans les années 1980. C'est pourtant une ville où se croisent aujourd'hui toutes sortes de communautés. Si une forte proportion de la population est toujours d'origine européenne, principalement des Calédoniens (ou « Caldoches ») mais aussi des Métropolitains (appelés « zoreilles ») qui y vivent définitivement ou qui y résident temporairement (notamment des fonctionnaires ou militaires français), il s'y trouve aussi une forte proportion, qui va en augmentant, de Kanaks ainsi que de Polynésiens (Wallisiens et Futuniens avant tout, mais également Tahitiens) et d'Asiatiques (Indonésiens, Vietnamiens, Chinois). C'est donc une ville très métissée mais à culture majoritairement européenne, où le français est très présent. Politiquement, il s'agit d'un bastion de la droite anti-indépendantiste.
Nouméa reste l'une des villes les plus industrialisées de l'Outre-mer français, par le biais surtout de l'usine de transformation de nickel de Doniambo, mais aussi par la présence d'un réseau assez dense de petites industries produisant pour le marché local, surtout dans les secteurs de l'agroalimentaire et des biens intermédiaires. Mais l'économie est avant tout tertiaire, avec une présence importante des fonctions et services publics d'État, de la Nouvelle-Calédonie, de la Province Sud et de la ville. Les activités touristiques, bien que peu développées comparativement à d'autres agglomérations d'Océanie ou de l'outre-mer français[1], sont surtout balnéaires et concentrées dans les baies au sud de la presqu'île, ce qui vaut à Nouméa d'être comparé par les visiteurs et les guides à un « petit Nice »[2]. De même, la présence de boutiques de luxe ou d'habillement dans son centre-ville, ses bistrots, restaurants et boulangeries lui ont valu le surnom touristique de « Paris du Pacifique » ou « petit Paris »[3],[4],[5]. Ces deux surnoms sont toutefois très peu utilisés par la population locale.
Géographie
[modifier | modifier le code]Le territoire nouméen est une péninsule dans l'océan Pacifique Sud, dont la superficie terrestre est de 45,7 km2[6], ce qui en fait la plus petite commune néo-calédonienne. Ses milieux naturels, marqués par un relief vallonné, sa situation littorale sur une côte-sous-le-vent ainsi que son climat et sa biocénose tropicaux, ont été fortement anthropisés du fait de l'urbanisation qui s'est accélérée à partir des années 1960.
Site et situation
[modifier | modifier le code]Le territoire de Nouméa est constitué d'une presqu'île sur la côte sud-ouest de l'île principale de Nouvelle-Calédonie, la Grande Terre, donnant sur son lagon ouest et la mer de Corail, dans l'océan Pacifique Sud. Elle est bordée au nord-est et à l'est par la commune du Mont-Dore, et au nord et au nord-ouest par celle de Dumbéa, qui font toutes deux partie de son agglomération.
Une ville française en Océanie
[modifier | modifier le code]Nouméa est d'abord située en Océanie, à 542 km au sud-sud-ouest de Port-Vila (Vanuatu)[7], à 1 472 km à l'est-nord-est de Brisbane (Queensland, Australie)[8], à 1 970 km au nord-est de Sydney (Nouvelle-Galles du Sud, Australie)[9], à 1 807 km au nord-nord-ouest d'Auckland (Nouvelle-Zélande)[10], à 2 086 km à l'ouest-sud-ouest de la collectivité d'outre-mer de Wallis-et-Futuna[11] ou encore à 4 614 km à l'ouest-sud-ouest de Papeete[12].
Mais Nouméa est également la ville française la plus éloignée de la capitale nationale, étant située, à vol d'oiseau, à 16 758 km de Paris.
Communes limitrophes
[modifier | modifier le code]Dumbéa | Dumbéa et Mont-Dore | Mont-Dore | ||
Lagon Sud | N | Lagon Sud | ||
O Nouméa E | ||||
S | ||||
Lagon Sud | Lagon Sud | Lagon Sud |
Géomorphologie et formations géologiques
[modifier | modifier le code]Son terrain est essentiellement composé de flyschs sédimentaires datées dans une fourchette allant du Priabonien à l'Éocène moyen, associés à quelques terrains allochtones isolés, ou klippes, de roches silicieuses (cherts ou phtanites) et calcaires (moitié ouest de la presqu'île de Nouville, la pointe sud de la péninsule autour du Ouen Toro), et à certains îlots plus anciens remontant au Sénonien et donc au Crétacé (autour de la baie des Citrons dans le sud-ouest de la péninsule, Tina au nord-est). L'essentiel des terrains des communes du Grand Nouméa sont d'âge Sénonien, avec une large bande littorale de terrains volcano-sédimentaires du Lias (Jurassique) autour de l'embouchure de la Dumbéa[13].
Elle dispose d'un relief accidenté constitué de plusieurs collines (Ouen Toro, Montravel, mont Coffyn, mont Vénus, etc.), culminant à celle de Montravel à 167 mètres d'altitude.
Sa particularité est que son centre-ville et certains de ses quartiers (dont la zone industrielle de Ducos) sont essentiellement construits sur des remblais ou des polders, réalisés après l'assainissement de différentes zones marécageuses littorales au XIXe siècle (centre ville de 1855 à 1872, quartier Latin et quartier de Montravel en 1882) ou bien plus récemment gagnés sur la mer (zone industrielle, port autonome, marinas, notamment celle du Port-Moselle qui a fait l'objet de plusieurs tranches entre 1906 et les années 1980). L'ancienne île Nou, autrefois un des sites du bagne de Nouvelle-Calédonie, est devenue une presqu'île artificielle rebaptisée Nouville après la construction de remblais et d'un pont reliant le port à l'île durant les années 1970 et la période dite du « boom du nickel »[14].
Littoral et hydrographie
[modifier | modifier le code]Nouméa est un port avec une rade profonde à laquelle l'accès se fait par l'une des plus grandes passes dans le récif corallien, donnant sur la mer de Corail dans l'océan Pacifique, entouré par plusieurs bassins hydrographiques.
Littoral
[modifier | modifier le code]Délimitée par les baies de Koutio-Kouéta au nord-ouest et de Boulari au nord-est, la côte où se situe Nouméa forme une succession de baies qui offrent un éventail d'activités : baignade (plages de l'anse Vata, de la baie des Citrons, de la baie de Magenta, de l'anse du Kuendu à l'extrémité ouest de Nouville), plaisance et nautisme (baie de Sainte-Marie, marinas des baies de l'Orphelinat et de la Moselle), port touristique (petite rade et quai Jules-Ferry) ou commercial et industriel (grande rade, baie de Numbo). Comme l'essentiel de la côte occidentale de la Grande Terre, le littoral nouméen était essentiellement constitué de mangroves, mais il est estimé aujourd'hui qu'entre 23 à 26 % de celle-ci a été détruite depuis 1960 du fait de l'urbanisation[15]. Il existe toutefois encore certaines zones de mangrove, comme dans le fond de la baie de Sainte-Marie au sud-est, celui de la baie de Koutio-Kouéta à l'arrière de la zone industrielle ainsi qu'à Rivière-Salée au nord-ouest, ou à Tina.
Domaine public maritime
[modifier | modifier le code]Le domaine public maritime communal comprend de nombreux îlots au large de la presqu'île. Le plus important d'entre eux par sa superficie est longtemps resté l'île Nou, transformée en une semi presqu'île artificielle par la construction de polders et d'un pont. Désormais, l'îlot le plus vaste de la commune est celui de Sainte-Marie (aussi appelé « Grand Sainte-Marie » ou île N'géa) qui constitue la limite est de la baie du même nom. Le littoral nouméen est ainsi entouré d'un chapelet d'îles et d'îlots côtiers :
- l'îlot Lassalle, dans le prolongement de la presqu'île de Tina, au nord-est ;
- les îlots Fourmis qui comprennent le Petit Fourmi (ou îlot Kuru) et le Grand Fourmi (ou îlot Tué), au large de la baie de Magenta, à l'est ;
- les îlots Sainte-Marie qui encadrent la baie du même nom au sud-est : l'îlot Sainte-Marie (ou Grand Sainte-Marie ou île N'Géa), l'îlot Uéré (ou Petit Sainte-Marie) et, plus petit, l'îlot N'Do. L'îlot Sainte-Marie, assez grand, offre plusieurs plages servant de lieux de camping ou de déjeuners pour les Nouméens, et notamment pour les élèves de la base nautique de la côte blanche, de l'autre côté de la baie. L'îlot Uéré possède une unique plage dans une petite anse qui sert de lieu de mouillage aux bateaux de plaisance et est un lieu fréquenté par les motomarines ;
- l'îlot Canard ou île aux Canards à l'entrée de l'Anse Vata, au sud. Accessible par des « taxis-boats », petites navettes maritimes partant de la plage de l'anse, ainsi que par voile, il est aménagé avec un fare servant de restaurant et un sentier sous-marin de découverte et de sensibilisation à la protection de la nature[16] ;
- l'îlot Brun[17], dans le prolongement de la pointe Chaleix[18] (à laquelle il est désormais relié par un pont) avec laquelle il forme le terrain de la base navale militaire de Nouméa. Il ferme la baie de l'Orphelinat, à l'ouest ;
- l'île Nou devenue la presqu'île artificielle de Nouville ;
- l'îlot Freycinet, dans le prolongement de la pointe Lestelle et du quartier de Koumourou qui constitue l'extrémité ouest de la presqu'île de Ducos ;
- les îlots Tindu et Kaméré, à l'entrée de la baie de Tindu, au nord de Ducos et au nord-ouest de la ville.
À cela il faut ajouter les îlots coralliens du lagon, plus éloignés vers le sud, plus ou moins aménagés et lieux de villégiatures pour les plaisanciers nouméens pour des sorties d'une journée ou pour les pratiquants des sports de glisse (planche à voile, funboard ou kitesurf) :
- l'îlot Maître, à 4 milles marins (environ 7,5 km) au sud-sud-ouest du port Moselle et à 2,5 milles (environ 4,5 km) de l'Anse Vata, dans l'alignement de l'îlot Canard. Doté d'un hôtel (il est ainsi le seul îlot nouméen à en posséder un), il est agrémenté d'un récif d'un mille de large entre l'îlot et sa balise ;
- l'îlot Signal, à 8 milles marins (environ 15 km) à l'ouest du port Moselle, il est le lieu où fut installée la première balise de Port-de-France et est situé à la sortie de la passe de Dumbéa, l'un des principaux points d'entrée des navires dans le lagon néo-calédonien, entre le récif de l'Annibal au nord-ouest et le grand-récif Aboré au sud-est ;
- l'îlot Larégnère, à environ 7 milles marins (environ 13 km) à l'ouest-sud-ouest du port Moselle ;
- le récif Crouy, parfois appelé îlot Crouy, récif corallien émergé formant un petit lagon intérieur, à 6,5 milles marins (environ 12 km) au sud-ouest du port Moselle ;
- l'îlot Goéland, à 6,7 milles marins (environ 12,5 km) au sud-sud-ouest du port Moselle et à 5,7 milles (en contournant l'îlot Maître, soit environ 10,5 km) au sud-ouest de l'Anse Vata. L'îlot est un important lieu de nidification de la sterne de Dougall (dont 10 % de la population mondiale réside en Nouvelle-Calédonie), et est donc fermé au public entre novembre et février[19] ;
- l'îlot Amédée, haut lieu touristique en raison de son phare, à un peu moins de 13 milles marins (environ 24 km) au sud-sud-est du port Moselle et à 10,5 milles au sud de l'Anse Vata. Il se situe à l'entrée de la passe de Boulari, l'un des principaux points d'entrée des navires dans le lagon néo-calédonien et dont le phare gardait l'entrée, entre le Grand Récif Aboré au nord-ouest et le récif Kwé au sud.
Ces îlots forment tous des espaces protégés, ou réserves spéciales. En 1989 est créé le parc du lagon sud, comprenant les réserves marines spéciales existantes depuis 1981 des îlots Maître et Amédée (à quoi s'ajoute le récif Aboré et la passe de Boulari) augmentées des nouvelles réserves des îlots Signal, Larégnère et l'île aux Canards, ainsi que l'îlot Bailly situé dans le domaine maritime communal du Mont-Dore. Enfin, y ont été rajoutées les réserves de l'épave du Humboldt (palangrier sabordé, récif de l'Annibal, près de la passe de Dumbéa) en 1996 et de la pointe Kuendu (extrémité ouest de Nouville) en 1998. Ces sites, qui forment la plus grande aire de protection marine de Nouvelle-Calédonie avec 177,36 km2, sont interdits à la chasse, à la pêche hauturière, au filet, à la canne ou sous-marine, ainsi qu'à la cueillette, l'enlèvement, le déplacement ou la récolte de tout corail ou coquillage[20].
De plus, deux réserves spéciales de faune ont été définies dans le domaine maritime de Nouméa : celle de l'îlot Goéland créée en 1995 en raison de la nidification des sternes de Dougall, et celle du récif de Sèche-Croissant, situé entre les îlots Larégnère à l'ouest et Maître à l'est, à environ 5 milles marins (environ 9 km) au sud-ouest du port Moselle, créée en 1994 car lieu de nidification pour les sternes diamants[21],[22].
Hydrographie
[modifier | modifier le code]Le réseau hydrographique est quasi inexistant dans la péninsule. En revanche, de l'eau se trouve entre les vallées de la Yahoué au sud-est (dans la commune du Mont-Dore) et celles plus importantes, au nord-ouest, de la Dumbéa (dans la commune du même nom) et de la Tontouta (sur le territoire de la commune de Païta). Nouméa a donc pu, tout au long de son histoire, s'approvisionner en eau douce auprès de ces deux bassins hydrographiques. Ainsi, en 1875 commencent les travaux de la construction d'un captage sur la Yahoué ainsi que de plus de 12 km de tranchées pour la conduite d'eau afin d'alimenter le chef-lieu : le tout est inauguré le [23].
Les besoins de Nouméa deviennent bientôt trop importants pour la seule conduite de Yahoué (dont le débit n'était que de 20 L/s), et bientôt un barrage est construit en amont de la Dumbéa. Les travaux commencent en et se terminent en mars 1894. Il s'agit d'un barrage avec filtre et bassin de régulation, tandis que la canalisation, inaugurée en 1895, d'une longueur de 29 km et établie autant en tranchée ouverte ou sur ouvrages d'arts, est constituée d'un tuyau en fonte de 40 cm de diamètre pour un débit de 65 L/s. Une deuxième conduite est aménagée en 1933, et, pour pallier la surconsommation d'eau liée, entre 1942 et 1946, à la présence de troupes américaines en Nouvelle-Calédonie, le premier réseau de pompes et de réservoirs est installé en 1942 tandis que les camps sont approvisionnés par des camions citernes.
Ce premier barrage est remplacé par un second construit entre 1951 et 1953 sur le bras est de la Dumbéa, puis surélevé en 1971-1972, ce qui lui permet de détenir une réserve d'eau de 650 000 m3 et d'alimenter la totalité des communes de Dumbéa et de Nouméa ainsi que l'usine SLN de Doniambo[24]. La première conduite, de 50 cm de diamètre, suivait le chemin de l'ancienne ligne de chemin de fer Nouméa-Païta (dit aussi « Petit train de la mine ») et était acheminée via la station du Mt Té, et la seconde aménagée à partir de 1971, d'un diamètre d'1 m, bénéficiait à l'origine de deux stations de pompage (aux lieux-dits du Trou des Nurses et du Val-Fleuri, toujours à Dumbéa). Le barrage de Dumbéa est géré en concession par la Calédonienne des eaux, filiale du groupe Suez.
Enfin, pour répondre à l'explosion urbaine de l'agglomération nouméenne et pallier les différentes périodes de sécheresse estivales, les communes du Grand Nouméa ont lancé ensemble, en 1998, la construction d'un « Grand Tuyau » de 46 km de long et de 1 m de diamètre acheminant l'eau depuis des stations de pompage par puits de forage sur le cours souterrain du fleuve de la Tontouta. Ce « grand tuyau » est installé à partir de 2000 le long de la RT1 (grand route de la côte ouest de la Grande Terre) et de la Voie express 2[25] et est géré par la Société anonyme des eaux de Tontouta (SADET), filiale de la Calédonienne des eaux et donc également du groupe Suez[26].
Ces différents équipements ont permis à Nouméa de posséder le meilleur taux d'accès à l'eau potable de la Nouvelle-Calédonie, puisqu'en 2004 99,6 % des foyers disposaient d'une alimentation individuelle. La consommation en eau du chef-lieu est particulièrement forte : les Nouméens engloutissaient ainsi en 2006 12,307 millions de m3 (12,307 milliards de L), pour 27 340 abonnés (soit une consommation par abonné de 450 000 L). La même année, l'ensemble du Grand Nouméa consommait 18,365 millions de m3 (18,365 milliards de L)[27].
Un milieu tropical anthropisé
[modifier | modifier le code]Nouméa, ville tropicale, est soumise aux effets combinés de son climat, de l'urbanisation et des activités humaines, entraînant une assez forte anthropisation de ses milieux naturels et des risques spécifiques face auxquels les populations et autorités locales tentent de s'adapter.
Climat
[modifier | modifier le code]Comme le reste de la Nouvelle-Calédonie, Nouméa dispose d'un climat tropical de savane (ou « humide et sec », avec hiver sec, noté Aw selon la classification de Köppen) tempéré par l'influence océanique et modifié périodiquement par les phénomènes El Niño ou La Niña, avec des vents dominants à l'est et au sud-est (les alizés) desquels elle est en partie protégée par la Chaîne centrale du fait de sa position sur la côte Ouest (« côte-sous-le-vent ») de la Grande Terre. Elle est cependant ponctuellement exposée, durant la saison fraîche, à des vents froids et forts d'ouest porteurs de précipitations (les « coups d'ouest »). Ce climat comprend des températures relativement chaudes (la moyenne des températures établie sur 12 mois pour la période 1981-2010 est d'environ 23,5 °C[28]) dont le ressenti est amplifié par une humidité assez forte (la moyenne annuelle du taux d'humidité de l'air oscillant entre 74 et 84 %)[29]. L'année est divisée en deux saisons séparées par deux inter-saisons, déterminées par la position de la zone de convergence intertropicale (ZCIT) et l'importance de l'anticyclone de l'île de Pâques : une saison chaude et humide (« été » ou « saison des cyclones ») de mi-novembre à mi-avril ; une première intersaison avec une diminution progressive du nombre de basses pressions, des précipitations et des températures de mi-avril à mi-mai ; la saison fraîche (« hiver ») de mi-mai à mi-septembre ; la deuxième intersaison (saison sèche) de mi-septembre à mi-novembre.
Du fait de ce climat tropical humide et sec ainsi que de sa situation, Nouméa bénéficie d'une exposition au Soleil importante, avec une durée d'ensoleillement normale annuelle de 2 548,7 heures pour la période 1981-2010[28]. C'est l'une des plus fortes de Nouvelle-Calédonie et d'un territoire français, légèrement inférieure à celles mesurées sur le littoral méditerranéen mais équivalente à celles de l'intérieur de plusieurs départements du Midi de la France telles que le centre de l'Hérault ou du Gard, le sud de l'Ardèche et de la Drôme ou encore le nord des Alpes-de-Haute-Provence[30]. C'est également à Nouméa que le rayonnement quotidien le plus fort de l'île a été atteint en 2006 avec 3 177 J/cm2 le [31]. Le flux solaire maximal quotidien dépasse les 1 130 W/m2 en début d'année[32].
Plusieurs autres caractéristiques du climat tropical se retrouvent tempérées par les influences océaniques et la protection des vents dominants : ce n'est pas là que s'enregistrent les plus fortes températures minimales ou maximales, ni les plus fortes précipitations de Nouvelle-Calédonie. Ainsi, la moyenne des précipitations à l'année (basée sur la période 1981-2010) est de 1 070 mm[28] (comparativement aux 1 674,8 mm de moyenne annuelle pour la même période pour la station de Wanaham à Lifou aux Îles Loyauté)[33], les mois les plus pluvieux (plus de 100 mm en moyenne) étant janvier, février, mars et dans une moindre mesure avril (la « période des cyclones » durant la saison chaude) ainsi que, de façon plus limitée (entre 90 et 100 mm en moyenne), mai et juin (période des pluies durant la saison fraîche), selon Météo-France[28]. La température maximale moyenne (toujours calculée à partir des données enregistrées entre 1981 et 2010) est de 26,6 °C, avoisinant les 30 °C durant la saison chaude de décembre à mars (le mois le plus chaud est février) et redescendant entre 23 °C et 25 °C durant la saison fraîche de juin à septembre. La minimale moyenne pour sa part est de 20,5 °C, presque toujours supérieure à 23 °C durant la saison chaude et descendant jusqu'à 17 °C durant les mois de saison fraîche (les plus frais étant juillet et août), toujours selon Météo-France. Les records de température enregistrés à Nouméa ont été de 36,8 °C le pour les maximales et 13,2 °C le pour les minimales[28].
Mois | jan. | fév. | mars | avril | mai | juin | jui. | août | sep. | oct. | nov. | déc. | année |
---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|
Température minimale moyenne (°C) | 23,3 | 23,7 | 23,1 | 21,8 | 20,1 | 18,7 | 17,4 | 17,3 | 18,1 | 19,5 | 20,8 | 22,3 | 20,5 |
Température moyenne (°C) | 26,4 | 26,7 | 25,9 | 24,6 | 22,9 | 21,4 | 20,4 | 20,3 | 21,4 | 22,8 | 24,1 | 25,6 | 23,5 |
Température maximale moyenne (°C) | 29,6 | 29,7 | 28,7 | 27,4 | 25,7 | 24,1 | 23,3 | 23,3 | 24,7 | 26,2 | 27,4 | 29 | 26,6 |
Record de froid (°C) date du record | 18,6 16.1984 | 19 24.1984 | 18,8 08.1988 | 16,7 23.1951 | 15,7 17.1994 | 13,6 21.1957 | 13,5 25.1955 | 13,2 10.1961 | 13,3 10.1954 | 14,2 02.1990 | 15,2 08.1956 | 17,8 17.1993 | 13,2 1961 |
Record de chaleur (°C) date du record | 36,8 25.1986 | 36,4 01.1991 | 36,4 01.1993 | 33,2 29.1957 | 32,7 04.2014 | 30,7 19.2002 | 30,9 30.2020 | 31,7 08.1995 | 33 29.2010 | 32,3 03.2003 | 34,9 20.2001 | 35,7 27.2010 | 36,8 1986 |
Ensoleillement (h) | 238,5 | 205,6 | 196,1 | 193,1 | 173,2 | 154,6 | 182,4 | 203,5 | 230,8 | 258,6 | 250,6 | 261,8 | 2 548,7 |
Record de vent (km/h) date du record | 41 13.1988 | 41 12.1981 | 56 14.2003 | 37 11.1989 | 27,6 21.2017 | 28 04.1984 | 28 15.2003 | 25 20.1989 | 26 08.1989 | 23 12.2010 | 24,6 16.2011 | 35 17.1986 | 56 2003 |
Précipitations (mm) | 111,8 | 129,7 | 168,3 | 109,6 | 91,9 | 99,8 | 67,1 | 72,3 | 39,2 | 45,8 | 55,6 | 78,9 | 1 070 |
Record de pluie en 24 h (mm) date du record | 255,2 14.2011 | 197 01.1969 | 136,2 09.2018 | 158,8 20.1983 | 172 07.2016 | 200,9 03.1972 | 109,6 02.2013 | 91,1 07.1952 | 74,8 08.1967 | 171,4 02.2001 | 115,2 07.1990 | 201,3 16.1986 | 255,2 2011 |
Nombre de jours avec précipitations | 9,7 | 10,4 | 13 | 10,8 | 11,2 | 10 | 9 | 8,6 | 5,6 | 4,6 | 7,2 | 6,9 | 107 |
dont nombre de jours avec précipitations ≥ 5 mm | 4,7 | 5,7 | 7,4 | 4,9 | 4,8 | 4,5 | 3,1 | 3,6 | 2,2 | 1,9 | 2,8 | 3 | 48,5 |
Diagramme climatique | |||||||||||
J | F | M | A | M | J | J | A | S | O | N | D |
29,6 23,3 111,8 | 29,7 23,7 129,7 | 28,7 23,1 168,3 | 27,4 21,8 109,6 | 25,7 20,1 91,9 | 24,1 18,7 99,8 | 23,3 17,4 67,1 | 23,3 17,3 72,3 | 24,7 18,1 39,2 | 26,2 19,5 45,8 | 27,4 20,8 55,6 | 29 22,3 78,9 |
Moyennes : • Temp. maxi et mini °C • Précipitation mm |
Mois | jan. | fév. | mars | avril | mai | juin | jui. | août | sep. | oct. | nov. | déc. | année |
---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|
Température minimale moyenne (°C) | 23,4 | 23,8 | 23,2 | 21,7 | 19,7 | 18,1 | 16,5 | 16,5 | 17,4 | 19 | 20,7 | 22,3 | 20,2 |
Température moyenne (°C) | 26,2 | 26,5 | 25,9 | 24,5 | 22,6 | 21,1 | 19,9 | 19,8 | 20,9 | 22,4 | 23,8 | 25,3 | 23,2 |
Température maximale moyenne (°C) | 29 | 29,3 | 28,5 | 27,3 | 25,6 | 24,1 | 23,2 | 23,1 | 24,3 | 25,7 | 26,9 | 28,4 | 26,3 |
Record de froid (°C) date du record | 17,5 07.1987 | 17,9 24.1984 | 14,5 24.1965 | 14,6 30.1968 | 12 22.1968 | 10,8 26.1985 | 8,9 28.1968 | 9,9 31.1976 | 9,9 09.1968 | 10,8 02.1990 | 13,2 01.1965 | 16 05.1966 | 8,9 1968 |
Record de chaleur (°C) date du record | 36,8 25.1986 | 35,4 15.1996 | 35,7 01.1993 | 33,4 02.2016 | 32,4 04.2014 | 30,8 19.2002 | 29,8 30.2020 | 31,7 09.1992 | 32,6 26.2020 | 31,9 03.2003 | 35,7 20.2001 | 35,5 19.2010 | 36,8 1986 |
Record de vent (km/h) date du record | 35 12.1988 | 31,1 03.2021 | 42,5 06.2021 | 38 11.1989 | 23,1 21.2017 | 23 04.1984 | 25 15.2003 | 25 11.1994 | 19 08.1989 | 21 25.1984 | 21 08.1990 | 36 17.1986 | 42,5 2021 |
Précipitations (mm) | 113,7 | 132,6 | 173,4 | 108 | 89,6 | 102 | 69,3 | 74,6 | 38,9 | 46,9 | 57,1 | 82,2 | 1 088,3 |
Record de pluie en 24 h (mm) date du record | 262,6 14.2011 | 131,6 12.1981 | 153,6 27.1996 | 176,8 07.1992 | 121,2 07.2016 | 173,2 03.1972 | 116,5 02.2013 | 88,2 13.2010 | 84,1 08.1967 | 195,8 02.2001 | 114,2 07.1990 | 205,1 16.1986 | 262,6 2011 |
Nombre de jours avec précipitations | 9,5 | 11 | 13,3 | 10,9 | 10,6 | 10,2 | 8,8 | 9 | 5,5 | 5,1 | 7 | 7,4 | 108,2 |
dont nombre de jours avec précipitations ≥ 5 mm | 4,8 | 6 | 7,8 | 5,2 | 4,7 | 4,3 | 3,2 | 3,8 | 2 | 1,7 | 3,2 | 3,4 | 50,3 |
Diagramme climatique | |||||||||||
J | F | M | A | M | J | J | A | S | O | N | D |
29 23,4 113,7 | 29,3 23,8 132,6 | 28,5 23,2 173,4 | 27,3 21,7 108 | 25,6 19,7 89,6 | 24,1 18,1 102 | 23,2 16,5 69,3 | 23,1 16,5 74,6 | 24,3 17,4 38,9 | 25,7 19 46,9 | 26,9 20,7 57,1 | 28,4 22,3 82,2 |
Moyennes : • Temp. maxi et mini °C • Précipitation mm |
Mais Nouméa est sujette, comme le reste de la Nouvelle-Calédonie, aux tempêtes tropicales qui vont de la simple dépression tropicale jusqu'au cyclone. Le dernier en date à avoir fortement touché la ville, Erica en 2003, a provoqué des dégâts importants du fait de la puissance de ses vents (la rafale la plus violente jamais enregistrée à Nouméa le fut ainsi le , avec 56 m/s soit environ 200 km/h)[28] et de son accélération subite qui a pris de court les météorologues ainsi que les autorités : à Nouméa, plusieurs arbres ont été arrachés, à quoi se sont ajoutés de nombreux dégâts matériels (une demi-lune datant de la Seconde Guerre mondiale a été balayée, le toit de l'université s'est envolé, etc.), 230 personnes ont dû être accueillies dans trois centres d'hébergement (Nouville, Anse Vata et Rivière-Salée), mais aucune perte humaine ne fut à déplorer sur Nouméa (le bilan humain sur l'ensemble du territoire néo-calédonien s'élevant à deux morts à quoi s'ajoute la mort d'un agent d'électricité après le cyclone lors de travaux de rétablissement de l'énergie sur le réseau). De plus, Nouméa fut la seule commune de l'archipel à ne pas souffrir d'une coupure en eau potable. En revanche, de nombreux voiliers de plaisance, mouillés dans les différentes baies de Nouméa, furent échoués du fait des vents violents et de la forte houle sur les digues du port[36]. Un autre cyclone, Vania, a provoqué l'enregistrement du record nouméen en matière de hauteur quotidienne maximale de précipitations, avec 255,2 mm tombées lors de son passage le , soit l'équivalent de deux mois et demi de précipitations en une seule journée[28].
Végétation
[modifier | modifier le code]Nouméa possède une végétation de type tropical, appartenant plus précisément à la forêt sèche, paysage classique de la côte Ouest de la Grande Terre. Cette formation végétale recouvre au début du XXIe siècle 100 ha sur le territoire de la commune. Écosystème le plus fortement menacé, sa sanctuarisation est prévue dans le plan d'aménagement et de développement durable (PADD) de la ville, tandis que les principaux espaces verts du chef-lieu sont devenus des zones de protection : le Ouen Toro (40 ha aménagés en sentiers de randonnées pédestres), le parc forestier sur la colline de Montravel (10 ha, traversés par un sentier botanique servant à sensibiliser le public sur la biodiversité locale), Koumourou à l'extrémité occidentale de la presqu'île de Ducos (10 ha) ou Tina à l'est (8 ha, notamment autour du Centre culturel Tjibaou)[37].
S'y ajoutent d'autres formations végétales anciennes comme la mangrove (230 ha sur le littoral), certains palétuviers ayant un âge estimé à plus de 300 ans. Elle aussi fortement menacée par l'urbanisation, elle fait l'objet de mesures de conservation, avec un sentier provincial de découverte à Ouémo à l'ouest, à quoi s'ajoutent des campagnes associatives de nettoyage à Kaméré ou Rivière Salée[37].
Par ailleurs, l'aménagement urbain s'est accompagné de l'installation d'arbres et plantes ornementales le long de la voirie ou sur les espaces publics (place des Cocotiers, ancien vélodrome du Receiving, tour des baies, plage de Magenta, etc.) dont des pins colonnaires typiques du Territoire (l'un des emblèmes calédoniens), des cocotiers, des palmiers ou des flamboyants. De plus, la mairie a lancé, dans les années 2010, l'installation de jardins familiaux collectifs dans plusieurs quartiers, parcelles à cultiver par les habitants visant à « favoriser le vivre-ensemble » entre les différentes communautés en associant le modèle horticole kanak (culture d'ignames, maniocs, bananes, haricots ou plantes propres à la médecine traditionnelle) à l'utilisation de fruits et légumes importés (salade, persil, tomates, etc.), tout en l'adaptant au milieu urbain. Ceci reproduit alors de manière planifiée et reconnue par les autorités un système déjà développé dans le cadre des « squats »[38].
Enfin, en 2013, 56,5 % des logements disposaient d'un jardin ou d'une cour[39], contribuant à la diffusion d'espèces végétales dans l'espace privé au travers d'arbres fruitiers (bananiers, cocotiers, citronniers, manguiers, goyaviers, arbres à pin, litchi, pommes-lianes, etc.), de plantes ornementales (hibiscus, bougainvilliers, palmiers, etc.) ou de légumes et herbes aromatiques.
Risques majeurs
[modifier | modifier le code]Nouméa est dotée depuis 2014 d'un plan communal de sauvegarde (PCS) et depuis 2019 d'un document d'information communal sur les risques majeurs (DICRIM). Ceux-ci recensent 15 risques majeurs pouvant avoir des effets sur les habitants et l'environnement de la ville, répartis en trois catégories : les risques naturels, sanitaires et technologiques[40].
Parmi les risques naturels, ce sont surtout les cyclones tropicaux de la saison chaude qui occasionnent les dégâts les plus importants (la combinaison de très fortes précipitations et de vents violents pouvant entraîner des victimes, destructions, inondations, mouvements de terrain, fortes houles, ondes de tempête...) et les plus fréquents sur le territoire nouméen (comme pour le reste de l'archipel néo-calédonien). Ainsi, entre 1880 et 2019, 40 de ces phénomènes météorologiques ont provoqué des dégâts à Nouméa[40]. Un système d'alerte cyclonique en quatre phases ou niveaux (préalerte, alertes 1 et 2, phase de sauvegarde) est déclenché par la présidence du gouvernement néo-calédonien[41].
Le site de Nouméa et ses potentialités expliquent son choix par les Français pour y installer le chef-lieu de leur nouvelle colonie en 1854, tandis que la présence humaine, fruit d'une histoire relativement récente malgré quelques traces de peuplements pré-européens, a largement contribué à le transformer.
Histoire
[modifier | modifier le code]Si la presqu'île nouméenne a pu être occupée dès le Ier millénaire, son histoire connue commence avec la colonisation française au milieu du XIXe siècle. Devenue la capitale d'un Territoire d'outre-mer puis d'une collectivité sui generis française après 1946, elle a connu de profonds bouleversements économiques, sociaux et politiques.
Avant les Français
[modifier | modifier le code]La préhistoire de Nouméa reste encore peu connue, transmise par quelques découvertes archéologiques, les récits faits par les premiers Européens ayant pris contact avec les populations locales et une tradition orale construite autour de conflits coutumiers et politiques qui divisent les clans kanaks de l'aire Djubéa-Kaponé.
Les récits et contacts des premiers Européens
[modifier | modifier le code]Les premiers contacts d'Européens dans la région de l'actuelle Nouméa ne remontent pas avant les années 1840, surtout du fait de l'installation à une date incertaine à la fin de cette décennie ou au début de la suivante d'un négociant et santalier anglais, James Paddon. En effet, avec la découverte par les navigateurs européens du canal Woodin en 1847 et du passage de la Havannah à la pointe sud-est de la Grande Terre, la baie de Boulari prend de l'importance. Elle devient le débouché d'une voie de navigation pour aller à Sydney, sur la côte Est, et aux Nouvelles-Hébrides.
C'est en découvrant le comptoir de Paddon sur l'île Nou que les militaires français vont décider d'implanter la capitale de leur nouvelle colonie sur la presqu'île lui faisant face, ce qui va devenir Port-de-France[42]. Le capitaine anglais comprend vite, de son côté, tout le parti qu'il peut tirer d'une telle situation. Il fait donc venir cinquante têtes de bétail d'Australie et fait profiter de sa source aux navires de la marine impériale française. Son expérience lui permet d'organiser un service postal avec Sydney, de recruter de la main d’œuvre indigène pour les travaux dans Port-de-France, d'améliorer les relations avec les chefs mélanésiens, et de révéler l'emplacement de gisements de charbon à Boulari[43].
Quoi qu'il en soit, la plupart des sources des négociants britanniques ou des militaires français témoignent que la presqu'île même était inhabitée (ou quasi inhabitée) lors de la fondation de Port de France. C'est même l'une des raisons qui ont poussé Tardy de Montravel à choisir ce site, espérant alors avoir peu de problèmes liés aux populations locales.
Période coloniale (1854-1945)
[modifier | modifier le code]Née moins d'un an après la prise de possession de la Nouvelle-Calédonie par la France, Port-de-France, vite rebaptisée Nouméa, reste une agglomération modeste jusqu'à la Seconde Guerre mondiale, ne se développant légèrement que grâce au bagne et aux activités liées au nickel.
Formation
[modifier | modifier le code]Après la prise de possession de la Nouvelle-Calédonie par la France le , la nouvelle administration coloniale cherche un endroit abrité et bénéficiant d'une bonne rade afin d'y créer un poste militaire et d'en faire le chef-lieu de l'île. Finalement, c'est le capitaine de vaisseau Louis-Marie-François Tardy de Montravel (qui a donné son nom à un des quartiers de la ville) qui choisit un site qui lui paraît idéal, une grande rade naturelle en eau profonde, protégée des vents dominants de sud-est et des vents d'ouest par l'île Nou et en face de deux importantes passes dans le récif, sur une presqu'île au sud-ouest de la Grande Terre[44]. Ainsi est fondé le Port-de-France qui se réduit à ses débuts à une simple garnison de militaires concentrés autour du fort Constantine (du nom du vaisseau commandé par Tardy de Montravel).
Aux militaires et fonctionnaires français s'ajoutent vite, dans les deux premières décennies de son existence, quelques colons, installés sur des concessions rurales dans la presqu'île, ou implantés initialement en « Brousse » mais qui se sont repliés vers cette place forte. Parmi eux, de nombreux Britanniques mais aussi des Allemands venus de l'Australie voisine individuellement.
Pour organiser cette ville naissante, l'administration coloniale, essentiellement constituée de militaires, entame rapidement une politique de planification et d'aménagement. Dès 1855, un premier plan d'urbanisme est constitué - pour n'être finalement présenté, après plusieurs modifications, qu'en 1860 - par le chef de bataillon du Génie Paul Coffyn (qui a donné son nom à une des collines de la presqu'île).
Par la suite, la ville va connaître plusieurs vagues successives de construction de nouveaux espaces gagnés sur la mer. Malgré ces grands travaux, le coût de la réalisation de ces plans, leur inadaptation à certains aspects de la morphologie du site, les aléas climatiques (les cyclones, comme ceux de 1862, 1869, 1872 et surtout 1880[45]) ou encore les raids mélanésiens (surtout en 1856 et 1857, durant la guerre contre le chef Kuindo[45]) font que, à l'exception de certains bâtiments officiels en pierre, la plupart des constructions sont précaires, vulnérables au feu et aux intempéries, et insalubres[46]. Les conditions sanitaires et d'hygiènes sont souvent difficiles pour les habitants. Ainsi, la lèpre est attestée à partir de 1880 tandis que la peste est présente, sporadiquement, au tournant du XXe siècle[45].
Malgré leur fort interventionnisme dans la gestion de l'aménagement de cette ville naissante, les autorités coloniales songent rapidement à y associer les colons y résidant. Le , Port-de-France devient pour la première fois une commune par décision du Commandant pour la Nouvelle-Calédonie : le maire et le corps municipal de 11 membres sont nommés par l'autorité supérieure de la colonie.
Cette première expérience est éphémère, puisque l'institution municipale est dissoute dès le . Elle réapparaît, cette fois-ci de façon définitive, en 1874 : il s'agit encore une fois d'un corps municipal, de 12 membres, entièrement nommé, mais une décision de la Chambre des députés de 1878 va le transformer en conseil municipal, élu pour la première fois en 1879 (le maire toutefois reste nommé par le gouverneur jusqu'au )[45],[47].
Le bagne et le nickel
[modifier | modifier le code]La ville va donc lentement se développer avec l'arrivée de colons, de négociants, mais surtout par la présence de 1864 à 1924 du bagne sur l'île Nou dans la rade du chef-lieu puis dans la presqu'île de Ducos (enceinte fortifiée pour accueillir, à partir de 1872, les déportés politiques de la Commune de Paris jugés les plus dangereux ou importants, les autres étant vite envoyés à l'île des Pins).
Mais c'est l'exploitation du nickel qui donne un véritable élan au chef-lieu et qui lui confère son rôle de capitale économique du territoire. L'exploitation de ce minerai, qui a commencé en 1875 à proximité de Nouméa (dans les mines du mont d'Or), attire des capitaux extérieurs et provoque la création de sociétés métallurgiques, dont l'une gérant la première fonderie installée à la pointe Chaleix de 1877 à 1885 fondée par l'industriel britannique John Higginson, bientôt regroupées en 1880 dans la Société Le Nickel (SLN).
Entre 1888 et 1974, la société est principalement détenue par la famille Rothschild et, avec un quasi-monopole en Nouvelle-Calédonie, devient un des tous premiers producteurs mondiaux de nickel[48].
L'or vert permet au chef-lieu de s'agrandir entre les années 1890 et 1920, du fait des investissements et de la main d'œuvre qu'il attire, surtout recrutée parmi les travailleurs asiatiques « engagés » sous contrats (Vietnamiens ou Chân Dăng, Indonésiens, Japonais), parmi les anciens bagnards ou encore parmi les petits colons de Brousse venus dans le chef-lieu à la suite de la faillite de leurs entreprises agricoles.
Dans ce contexte, entre la fin du XIXe siècle et le début de la Seconde Guerre mondiale, Nouméa s'étend progressivement au-delà des limites du plan Coffyn, dans les vallées qui en partent vers le nord (la Vallée du Tir), vers l'est (la Vallée des Colons) et vers le sud (le Faubourg Blanchot). C'est aussi essentiellement grâce au bagne d'abord puis au nickel qu'elle se modernise lentement, avec l'éclairage public au pétrole (avec 36 réverbères en 1882), puis au gaz de 1883 à 1932 et finalement électrique[49].
De même, pour les communications avec le reste de la colonie et du monde, le premier réseau télégraphique est mis en place par l'inauguration du câble sous-marin Bundaberg-Téoudié en 1893[45] tandis que la télégraphie sans fil (TSF) fait son apparition en 1925 avec la station de la pointe de l'Artillerie[50].
Malgré ces développements, l'industrie du nickel va connaître un important ralentissement du fait de la crise des années 1930, donnant un coup d'arrêt momentané à la croissance urbaine de Nouméa qui va reprendre, et de plus belle, durant la Seconde Guerre mondiale.
La Seconde Guerre mondiale
[modifier | modifier le code]En , le Conseil général et le Conseil privé, organe consultatif composé de quatre civils et deux fonctionnaires nommés par le gouverneur, votent à plusieurs reprises en faveur de continuer la guerre contre l'Allemagne nazie aux côtés de l'Empire britannique. Plusieurs notables, derrière le notaire de Nouméa Michel Vergès, en profitent pour demander une réforme donnant plus de pouvoir aux institutions élues par les colons, à travers un « Manifeste à la population ». Le gouverneur en place, Georges-Marc Pélicier, à l'origine lui aussi favorable à une continuation de la guerre mais par la suite hésitant et hostile aux revendications de Michel Vergès, fait publier au journal officiel les décisions du régime de Vichy. Le , le conseil général décide de « désapprouver le Gouverneur » et « de se mettre en rapport direct avec le général de Gaulle ». Le , le gouverneur Pélicier est remplacé par le colonel Denis, nommé par Vichy pour assurer le maintien de la fidélité de la colonie à l'État français. Dans le reste de l'Empire, plusieurs colonies se sont totalement ralliées à la France libre (les Nouvelles-Hébrides voisines dès le sous la conduite du commissaire résident de la France dans ce condominium franco-britannique, Henri Sautot, puis le Tchad gouverné par Félix Éboué le , le Cameroun le lendemain sous l'impulsion du capitaine Leclerc, le Moyen-Congo et l'Oubangui-Chari grâce à Edgard de Larminat le 28 et les établissements français de l'Océanie à la suite d'un référendum le ). Une action de force est organisée par le Comité De Gaulle de Michel Vergès, Raymond Pognon (éleveur à Bourail) ou Georges Dubois (ingénieur-géomètre à Nouméa), en lien avec la France libre - qui décide de nommer comme gouverneur Henri Sautot.
Un rassemblement est organisé à l'extérieur de la ville de nuit afin de marcher sur Nouméa au matin du , jour de l'arrivée prévue de Sautot. De nombreux citadins s'associent au cortège. Si le colonel Denis fait installer un barrage pour les stopper à Rivière-Salée, à l'entrée de la ville, les insurgés prennent sans difficulté et sans effusion de sang le contrôle des points stratégiques et Henri Sautot, installé dans l'hôtel du gouverneur à la fin de la journée, peut y déclarer officiellement le ralliement de la colonie à la France libre[51]. Le , une croix de Lorraine monumentale a été inaugurée au sommet du mont Coffyn, dominant la baie de l'Orpelinat et le quartier du Trianon.
Après l'attaque de Pearl Harbor par les Japonais le , le gouvernement américain décide de transformer la Nouvelle-Calédonie en base de relais en 1942, en accord avec les autorités de la France libre, et en fait un gigantesque « porte-avions » et sa principale base arrière pour la guerre du Pacifique. Les premiers hommes (17 000) débarquent le à Nouméa, faisant plus que doubler la population de cette petite agglomération (qui ne compte alors qu'environ 10 000 habitants)[52],[53]. Le quartier général de la 23e division d'infanterie de l'US Army (surnommée Americal Division ou Poppy Force), commandée par le général Alexander Patch, est installé à l'Anse Vata dans un nouveau bâtiment appelé le « Pentagone », à côté de l'hôpital militaire (devenu, après le conflit, la Polyclinique de l'Anse Vata). Les Américains apportent avec eux la modernité et marquent profondément les habitants de la ville : Coca-Cola, chewing-gum, dancings (comme la demi-lune du Receiving ou le camp Barnes à l'Anse-Vata), snacks-bars, cinéma et spectacles en plein air (surtout au Motor Pool), matchs de boxe et de catch, entre autres. La nécessaire organisation de la détente et du repos des soldats permet la constitution d'une véritable économie de loisir qui enrichit de nombreux Nouméens, développe et modernise les infrastructures (diffusion de l'électricité, du goudronnage des rues et des routes, aménagement d'aérodromes, adaptation des quais), tandis que l'importation constante de matériel fait du port le deuxième de l'océan Pacifique derrière celui de San Francisco en 1943 (250 000 tonnes manipulées cette année). Les Américains emploient une main d'œuvre importante pour l'entretien du matériel et du réseau routier qu'ils recrutent parmi les « engagés » indonésiens ou Chân Dăng ainsi que parmi les « Indigènes ». Pour travailler en tant que dockers sur le port, ils font venir de nombreux Kanaks des îles Loyauté, qu'ils logent dans le camp de Montravel, contribuant ainsi à augmenter la présence mélanésienne en ville[54]. Les salaires augmentent pour toutes les couches de la société.
Plusieurs quartiers de Nouméa gardent encore la trace toponymique de cette présence : Receiving (ancien quartier du Vélodrome où l'US Army a installé une station radio)[55], Motor Pool (ainsi nommé car utilisé par les Américains pour entreposer et réparer leurs engins motorisés)[56] sont des noms de quartier hérités d'anciennes zones militaires américaines. Certaines demi-lunes en tôle ondulée datant de cette époque jalonnent encore la ville (l'une d'entre elles abritant le musée de la Seconde guerre mondiale, inauguré à l'occasion du 73e anniversaire du ralliement à la France libre le )[57], tandis que les deux aéroports la desservant (celui de Tontouta pour les vols internationaux, et celui de Magenta pour les liaisons domestiques) ont été essentiellement aménagés durant la guerre. Beaucoup de Néo-calédoniens et de Nouméens ont gardé une certaine nostalgie de cette époque, et encore aujourd'hui, de nombreuses cérémonies commémorent tous les ans cette période autour du mémorial américain situé au Port Moselle. Après-guerre, certaines demandes ont été envoyées à Washington pour faire de la Nouvelle-Calédonie le 51e État d'Amérique[58].
Après 1945
[modifier | modifier le code]La Seconde Guerre mondiale puis l'abandon du statut colonial et de l'indigénat ont entraîné de profondes mutations de la société et de l'économie néo-calédoniennes, le chef-lieu devenant alors un véritable miroir de ces transformations.
Le boom du nickel
[modifier | modifier le code]La présence de l'US Army a durablement dopé l'économie néo-calédonienne qui va atteindre son apogée dans les années 1960-1970 : c'est l'époque du « Boom du Nickel ». L'or vert permet à l'île de s'enrichir considérablement, et c'est surtout Nouméa qui bénéficie des retombées économiques de cette exploitation grâce à la présence de l'usine SLN de Doniambo. Une véritable zone industrielle se développe autour de cette dernière à Ducos. Principale conséquence de ce boom économique : l'augmentation rapide de la population du fait d'un exode rural relativement important mais surtout d'une forte immigration tahitienne, wallisienne et futunienne, à quoi s'ajoutent de nouvelles arrivées de Métropolitains. En trente ans, entre 1946 et 1976, le nombre d'habitants est ainsi multiplié par six, passant de 10 605 personnes à 56 078 résidents. Ceci s'accompagne alors d'une vague d'extension frénétique et plutôt anarchique de la « capitale » qui s'étale rapidement dans l'ensemble de la presqu'île avec l'utilisation massive du béton et la construction de tours, copiées sur les grands ensembles urbains métropolitains, à Montravel, Rivière Salée, Saint-Quentin à la sortie de la ville ou Magenta. De nouveaux terre-pleins agrandissent le port et font pratiquement de l'ancienne île Nou une presqu'île artificielle. Une voie rapide est aménagée entre 1968 et 1969 pour desservir, depuis le centre-ville, l'usine et les nouveaux quartiers du Nord, en suivant le tracé de l'ancien « petit train de la mine » : la voie express n°1 - Route du Normandie, plus généralement appelée voie de dégagement[59].
Le développement économique comme l'abolition de l'indigénat en 1946 changent également la composition ethnique de la ville. Jusqu'ici presque exclusivement européenne, Nouméa devient de plus en plus pluriethnique, avec un accroissement important des Kanaks venus avec l'exode rural (ils passent ainsi de 869 travailleurs « indigènes » et un peu moins de 10 % de la population nouméenne à 2 432 « résidents libres » et 11 % en 1956, puis 20 % en 1983[60],[61]) et l'arrivée des Polynésiens pour travailler comme salariés de l'usine SLN ou dans le bâtiment.
À partir de la fin des années 1960, un mouvement de revendication, porté par la première génération de Mélanésiens à avoir pu partir étudier en Métropole (Nidoïsh Naisseline, Élie Poigoune, Jean-Marie Tjibaou, Jacques Iekawé), milite pour une reconnaissance de la culture et d'une identité kanakes : pour eux, l'un des objectifs majeurs de leur combat, qui va évoluer vers le nationalisme et l'indépendantisme dans les années 1970, est d'arriver à une plus forte représentation symbolique des Kanaks dans « Nouméa la blanche »[62]. C'est ainsi qu'est organisé, en 1975, par Jean-Marie Tjibaou, le festival des arts mélanésiens Mélanésia 2000 sur la plage 1000 au nord-est de la presqu'île. Pour répondre à ces aspirations, l'administration et les autorités incorporent de plus en plus de Kanaks au sein de la fonction publique territoriale implantée à Nouméa (outre Jean-Marie Tjibaou, Jacques Iekawé est tout particulièrement chargé d'organiser cette « promotion mélanésienne »), et des mesures financières sont décidées en faveur de la « Brousse » et des Îles[63]. Un centre culturel (futur et actuel centre Ko We Kara), financé par l'État, est inauguré en 1982 à l'entrée nord de la ville, au bord de la voie de dégagement du côté de Ducos, dans le but de servir de « vitrine » de la culture mélanésienne et de « lieu de rencontre culturel pour les Kanak de la Grande-Terre et des îles ». Mais, « rapidement récupéré par les Kanak de la mouvance du parti loyaliste », ce lieu est vite boycotté par les indépendantistes[64].
Les événements (1984-1988)
[modifier | modifier le code]Ces tensions politiques et ethniques sont exacerbées avec les effets de la crise économique mondiale liée au premier choc pétrolier de 1973 qui touche aussi la Nouvelle-Calédonie. Cela va aboutir à des affrontements brutaux dans les années 1980 qui vont opposer séparatistes du Front de libération nationale kanak et socialiste (FLNKS), emmenés par l'UC de Jean-Marie Tjibaou, et loyalistes dont le principal parti, le Rassemblement pour la Calédonie dans la République (RPCR), est mené par le député nouméen Jacques Lafleur.
Nouméa devient le bastion des anti-indépendantistes et échappe un temps aux affrontements qui ont surtout lieu en Brousse, même si le centre-ville est régulièrement le théâtre de manifestations des deux camps, qui se font parfois face dans la rue mais le plus souvent pacifiquement, comme le à l'occasion de la venue sur le Territoire du secrétaire d'État aux DOM-TOM Georges Lemoine[65],[66].
Néanmoins, après la mort le d'Yves Tual, un jeune « Caldoche » (ou Calédonien d'origine européenne dont la famille est présente dans l'archipel depuis plusieurs générations) de 17 ans tué d'une balle de fusil tirée à distance par des indépendantistes[67], des émeutes violentes ont lieu à Nouméa.
La transformation de la ville
[modifier | modifier le code]L'application de ces accords et les statuts qui en découlent ont des conséquences directes sur l'espace urbain. Tout d'abord, la nouvelle organisation institutionnelle et l'autonomie accrue de l'archipel, avec de nombreux transferts de compétences, mais aussi son intégration toujours plus poussée dans son environnement régional, entraînent l'implantation d'institutions et administrations nouvelles : au Congrès, qui siège toujours dans le bâtiment de l'Assemblée territoriale qu'il remplace et à l'emplacement de l'ancien Conseil général au boulevard Vauban, s'ajoutent ainsi l'hôtel de la Province Sud (la « Maison bleue », 1989) et celui du Gouvernement de la Nouvelle-Calédonie (2002) à Port Moselle au pied de la pointe de l'Artillerie.
De même, plusieurs revendications des indépendantistes commencent à prendre effet pour rendre la culture mélanésienne plus visible en ville. Le symbole de cette évolution reste la création de l'Agence de développement de la culture kanak (ADCK) en 1989 qui porte la construction du Centre culturel Tjibaou.
Outre ces évolutions entraînées par les différents accords sur l'avenir institutionnel de l'archipel, Nouméa connaît d'importants bouleversements liés à un retour de la croissance démographique. À partir des années 1990, le maire Jean Lèques entreprend une importante politique de réaménagement urbain. Il fait réhabiliter ainsi certains quartiers désaffectés comme Rivière-Salée (qui se voit doter d'une médiathèque municipale en qui est ensuite agrandie en 2011[68] ainsi que d'un café-musique baptisé Le Mouv’ en 2001[69]) et Ducos dans la périphérie nord de Nouméa ou encore la Vallée-du-Tir. Les espaces de la place des Cocotiers sont totalement renouvelés : les monuments anciens de la place (la fontaine Céleste, le kiosque à musique, les différents squares) sont restaurés.
À cette politique s'ajoute une expansion due à la forte augmentation de la population nouméenne (65 110 habitants en 1989, 76 293 en 1996 et 91 386 en 2004[70]), alimentée par un solde migratoire très positif avec une arrivée toujours forte de jeunes actifs Mélanésiens venus de Brousse et plus encore des îles Loyauté. Ce développement démographique a nécessité une intense activité de constructions d'habitats et de nouveaux lotissements ne cessent d'être aménagés dans la presqu'île.
Au XXIe siècle, entre réussites et difficultés
[modifier | modifier le code]De plus, l'agglomération nouméenne, appelée Grand Nouméa, connaît un processus d'étalement spatial en périphérie de plus en plus important. Aux apports des migrations externes à la ville (nouveaux arrivants polynésiens notamment) s'ajoute, depuis les années 1980, un phénomène de fuite du centre urbain vers la banlieue, favorisé par une popularisation de l'usage individuel de l'automobile, de plus faibles coûts du foncier et de l'immobilier en banlieue et une recherche d'espace de la part de certains habitants issus des classes moyennes ou aisées. De plus les quartiers de la ville restent divisés entre populations d'origine européennes dont les caldoches et les zones à majorité kanaks.
La transformation progressive de Nouméa d'une simple place militaire française en 1853 à une ville moyenne en pleine expansion au début du XXIe siècle a contribué à en faire un acteur majeur de la vie politique et institutionnelle de l'archipel.
Nouméa est touchée en mai 2024 par les émeutes qui ont fait 6 morts et conduit à la proclamation de l'état d'urgence.
Administration et politique
[modifier | modifier le code]Nouméa, de par son poids démographique écrasant (représentant à elle-seule les 2/5e de la population du territoire), est donc déterminante dans la vie politique de la Nouvelle-Calédonie. Elle en est le chef-lieu, de même que son principal bastion de l'anti-indépendantisme.
Le chef-lieu de la Nouvelle-Calédonie
[modifier | modifier le code]Nouméa est le chef-lieu de la Nouvelle-Calédonie, elle est donc le siège du Haut-commissariat (« Haussariat »), résidence du délégué du gouvernement de la République française, ainsi que du Congrès de la Nouvelle-Calédonie (organe législatif du territoire), du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, de l'administration centrale néo-calédonienne, du Sénat coutumier, du Conseil économique, social et environnemental, du vice-rectorat de l'académie, d'une cour d'appel dont la juridiction s'étend également sur Wallis-et-Futuna et de la plupart des établissements publics d'État, locaux ou mixtes.
C'est également le chef-lieu de la Province Sud, elle accueille donc l'Hôtel de la Province (appelée aussi la « Maison Bleue » par les médias locaux). Le centre-ville abrite également le Conseil coutumier de l'aire Djubéa-Kaponé.
Elle est de plus le siège central de la zone de défense et de sécurité de la Nouvelle-Calédonie (qui comprend aussi Wallis-et-Futuna), par conséquent du commandement supérieur des Forces armées de Nouvelle-Calédonie (FANC), du commandement de la gendarmerie et du commissariat central (ou Hôtel de police) de la police nationale pour cette zone. Il s'y trouve deux bases importantes du Régiment d'infanterie de marine du Pacifique - Nouvelle-Calédonie (RIMAP-NC), à la Pointe de l'Artillerie surtout mais aussi la caserne Gally-Passebosc à la limite sud-est du centre-ville (à quoi s'ajoute, dans le Grand Nouméa, celle de Plum au Mont-Dore). Nouméa est également une base navale, installée à la Pointe Chaleix.
Pour ce qui est de la coopération internationale, Nouméa est le siège du secrétariat général de la Communauté du Pacifique (ancienne Commission du Pacifique Sud CPS) et de plusieurs consulats. Chaque année, il s'y tient le Forum francophone du Pacifique réunissant les établissements de l'Alliance française et des Instituts français d'Asie-Pacifique, des intellectuels, journalistes, écrivains, artistes francophones de la région, avec tables rondes, manifestations scientifiques, réunions de concertation et événements artistiques ou musicaux[71].
Mais, surtout, il s'agit de la plus ancienne commune de Nouvelle-Calédonie, dotée de sa propre identité visuelle et qui a développé des relations d'intercommunalité avec ses voisines et de jumelage avec d'autres villes de France métropolitaine ou d'Océanie.
L'administration municipale
[modifier | modifier le code]Nouméa est la plus ancienne commune de la collectivité néo-calédonienne, constituée depuis 1874. Elle avait déjà eu un premier conseil municipal, désigné par le Gouverneur, lorsqu'elle s'appelait encore Port-de-France, de 1859 à 1860. Son premier maire élu, et non nommé par le gouverneur, fut Eugène Porcheron en 1882. Depuis 2008, le conseil municipal est composé de 53 élus, contre 45 de 1983 à 1995 puis 49 de 1995 à 2008, et comporte 12 postes d'adjoint au maire (il y en avait trois de plus lors de la mandature 2008-2014 et deux de plus de 2014 à 2020). Les élections municipales ont lieu, comme pour les autres communes françaises, tous les six ans, au suffrage universel de tous les citoyens français et européens, selon un scrutin proportionnel plurinominal avec listes bloquées à deux tours et prime majoritaire mis en place à partir de 1983, remplaçant alors le précédent scrutin majoritaire plurinominal[72]. L'hôtel de ville est installé depuis 1975 dans un bâtiment construit spécialement à cet effet, à l'ouest de la place des Cocotiers au centre-ville.
Héraldique
[modifier | modifier le code]Blason | ||
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Détails | Le statut officiel du blason reste à déterminer. |
Les symboles du blason (cagou, vaisseau à voile, hippocampes) ont été définis par Eugène Bizeul, en 1982, à la suite d'un concours public lancé par la mairie en 1976. Cet écusson est ensuite remodelé par l'artiste local Marcel Pétron en 1991 pour prendre sa forme actuelle. Selon la Ville de Nouméa, la goélette représente l'histoire de la commune et du port, l'utilisation du cagou reprend ainsi l'animal endémique devenu emblématique du Territoire, les hippocampes et l'azur plein de l'écu renvoient quant-à-eux au lagon dans lequel se conjuguent le ciel et la mer[73],[74]
Intercommunalité
[modifier | modifier le code]Pour faire face aux problématiques engendrées par l'étalement urbain et la formation de l'agglomération du Grand Nouméa, le chef-lieu s'est progressivement associé à ses trois communes voisines de Dumbéa, du Mont-Dore et de Païta dans une série de syndicats intercommunaux depuis la deuxième moitié des années 1990. Il s'agit tout d'abord de trois syndicats à vocation unique (SIVU) pour les transports scolaires (Transco) en 1996[75], l'approvisionnement, la distribution et la gestion des eaux du Grand Nouméa (EGN) en 1998[76] et pour le traitement des ordures ménagères (TOM) en 2005[77]. Toujours en 2005, une mission intercommunale, devenue l'année suivante le syndicat intercommunal à vocation multiple (SIVOM) du Grand Nouméa (SIGN), a été créée, dans le but de réfléchir au renforcement de l'intercommunalité pouvant amener à la création future d'un établissement public de coopération à fiscalité propre de type « communauté d'agglomération ». Il est chargé également de piloter le volet intercommunalité des contrats d'agglomération signés tous les cinq ans avec l'État et la Province Sud[78].
En 2010, les trois SIVU ont été supprimés, deux d'entre eux (EGN et TOM) ayant été absorbés par le SIGN, le troisième, Transco, étant fusionné avec les régies des transports des quatre communes (avec surtout la gestion du réseau de bus de la ville de Nouméa, Karuïa) et les services compétents en la matière de la Province Sud (et donc le réseau interurbain CarSud) pour créer le nouveau syndicat mixte des transports urbains (SMTU)[79].
Le SIGN est dirigé par un Comité syndical, son assemblée délibérante constituée de 12 délégués titulaires (et autant de suppléants) désignés par les conseils municipaux des communes membres à raison de six pour Nouméa et de deux pour chacune des trois autres municipalités. Ils élisent en leur sein pour cinq ans son président[80].
Le SMTU, pour sa part, est organisé autour d'un Comité syndical de neuf délégués titulaires (et autant de suppléants) désignés par les conseils municipaux ou l'Assemblée de la Province Sud, dont trois pour cette dernière et autant pour le conseil municipal de Nouméa, et un pour chacune des trois autres communes, qui choisissent en leur sein un président et quatre vice-présidents (un par collectivité qui ne détient pas la présidence) pour un mandat de quatre puis trois ans[81]. Le SIGN comme le SMTU siègent dans un immeuble du « Cœur de ville » à Dumbéa, près de la limite nord du territoire nouméen et à côté du lycée du Grand Nouméa et du centre commercial Kenu'in.
Jumelages
[modifier | modifier le code]Ville | Pays | Période | ||
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Gold Coast[82] | Australie | depuis | ||
Nice[82] | France | depuis le | ||
Papeete[82] | France | depuis le | ||
Taupo[82] | Nouvelle-Zélande | depuis le |
Vie politique municipale
[modifier | modifier le code]La ville de Nouméa est un fief anti-indépendantiste et, du fait des clivages traditionnels de l'échiquier néo-calédonien, de droite. Cependant, longtemps dominée par un parti (le RPCR), sa vie politique locale s'est progressivement complexifiée depuis le début du XXIe siècle. En effet, du fait de l'éparpillement de l'électorat anti-indépendantiste entre plusieurs formations politiques différentes, essentiellement le Rassemblement et l'Avenir ensemble puis Calédonie ensemble, Nouméa, qui reste un bastion de la droite loyaliste calédonienne, n'est plus totalement acquise au RPCR.
Longtemps un fief du RPCR (1977-2014)
[modifier | modifier le code]Nouméa est longtemps restée un bastion du Rassemblement pour la Calédonie dans la République (RPCR), également appelé après 2004 Rassemblement-UMP puis simplement Le Rassemblement depuis 2014, le parti historiquement dominant du camp anti-indépendantiste créé par Jacques Lafleur. Roger Laroque, qui a dirigé la commune pendant 32 ans (1953-1985), a contribué à fonder le RPCR en 1977. Lors des élections municipales de 1983, les premières où il se présente sous cette étiquette et les dernières auxquelles il participe avant son décès, sa liste emporte près des trois quarts des suffrages exprimés (74,15 %) et la totalité des sièges. Son successeur Jean Lèques, en fonction de 1986 à 2014, a été élu puis réélu au 1er tour de chaque élection municipale jusqu'en 2008 (58,65 % des voix et 37 conseillers sur 45 en 1989[83], 56,8 % des suffrages et 40 sièges sur 49 en 1995, 53,39 % et 39 élus en 2001).
À la veille des élections de 2008, le conseil municipal était ainsi constitué : 39 élus pour le Rassemblement-UMP (dont le maire et ses 14 adjoints), 4 pour l'autre parti non-indépendantiste Avenir ensemble (issus de deux listes non RPCR en 2001 : « Nouméa, c'est Capital"e" » menée par Sonia Lagarde qui unissait le parti « Alliance » et le Mouvement pour la France local, tous deux opposés à l'Accord de Nouméa à l'époque, la liste avait obtenu en 2001 22,6 % des suffrages, trois des cinq élus de cette liste se sont intégrés à l'Avenir ensemble ; « Tous d'ici » d'Isabelle Ohlen qui est l'unique élue de cette liste formée entre différentes personnalités de la société civile et les indépendantistes modérés de la FCCI et se battant surtout pour la mise en place d'un destin commun, la liste avait obtenu 5,3 % des suffrages), 2 pour le Front national (11,1 %), 2 de la liste « Alternative citoyenne » (7,6 % en 2001, les deux élus sont l'indépendantiste Gérald Cortot de l'Union calédonienne et Jean-Raymond Postic de la société civile) et 2 pour le Mouvement pour la France (qui ont fait sécession du groupe « Nouméa c'est capital"e" » en 2006 pour critiquer la position de l'Avenir ensemble, dont les 3 autres membres de ce groupe sont adhérents, au sujet du corps électoral[84]).
Lors des élections municipales de 2008, Nouméa s'offre non seulement un second tour pour la première fois de l'histoire de la ville, mais également une triangulaire, du fait de la présence de sept listes et de l'émiettement du camp anti-indépendantiste en quatre formations : la liste Rassemblement-UMP du maire sortant, la liste « Changer, c'est capital"e" » menée par l'Avenir ensemble Sonia Lagarde, la liste « Nouméa, la diversité en mouvement » du sénateur de l'Union pour un mouvement populaire (UMP) et du Rassemblement pour la Calédonie (RPC, fondé en 2006 par des dissidents du Rassemblement fidèles à Jacques Lafleur) Simon Loueckhote et le Front national de Bernard Herpin. À cela s'ajoutaient deux listes indépendantistes, dont celle FLNKS appelée « Alternatives citoyennes » du Palika Sylvain Pabouty et celle du Parti travailliste (bras politique du syndicat USTKE) Jean Durut, et enfin la liste de société civile accordiste « Nouméa c'est ma ville » de Jean-Raymond Postic. Lors du 1er tour le , trois listes, toutes anti-indépendantistes et dont les trois chefs sont membres de l'UMP, se sont qualifiées pour le second tour : la liste de la majorité sortante de Jean Lèques (11 057 voix, soit 43,49 % des suffrages), la liste Avenir ensemble de Sonia Lagarde (6 290 votes et 24,74 %) et la liste RPC de Simon Loueckhote (3 185 bulletins et 12,53 %), avec une très faible participation de 52,32 % des inscrits. Le Rassemblement-UMP et Jean Lèques remportent à nouveau la ville au second tour le , avec plus de 4 000 voix d'avances sur Sonia Lagarde, soit plus de 12 000 suffrages, ce qui leur permet d'obtenir, sans avoir réuni la majorité absolue en voix (49,41 %), la majorité au conseil avec 40 élus sur 53. La liste « Changer, c'est capital"e" » obtient quant-à-elle 33,11 % des suffrages et 9 conseillers municipaux (qui participent quelques mois plus tard, avec des élus d'autres collectivités, à la création du nouveau parti non-indépendantiste Calédonie ensemble sur la base d'une scission de l'Avenir ensemble), et « Nouméa la diversité en mouvement » 17,47 % et 4 sièges (les élus de cette liste, en rupture avec Jacques Lafleur, créent peu de temps après leur propre parti, le Mouvement de la diversité ou LMD), la participation étant légèrement meilleure qu'au second tour, 54,09 % des inscrits s'étant déplacés aux urnes[85].
Plusieurs bouleversements modifient ensuite la composition du conseil municipal : le médiateur Philippe Blaise quitte le Rassemblement-UMP en pour marquer son opposition à la levée du drapeau dit « Kanaky » ou indépendantiste sur les édifices publics (dont la mairie de Nouméa) aux côtés du drapeau national français (une initiative lancée alors par le président du parti, Pierre Frogier), et siège ensuite comme non-inscrit dans l'opposition (tout en fondant sa propre formation politique, le Mouvement républicain calédonien ou MRC), réduisant ainsi le groupe de la majorité municipale à 39 élus sur 53[86]. Toutefois, le même sujet des deux drapeaux provoque la défection de deux conseillères du groupe « Changer c'est capital » (qui passe ainsi de 9 à 7 membres), Jacqueline Bernut et Marie-Laure Lafleur, en avril et [87] : siégeant d'abord aussi comme non inscrites, elles rejoignent rapidement le groupe du Rassemblement-UMP, qui compte donc désormais 41 conseillers. Ce nombre est porté à 42 avec le ralliement de l'une des quatre conseillères de « Nouméa la diversité en mouvement », Gloria Outu, en [88].
Mais le principal bouleversement intervient en 2013, lorsque le 1er adjoint au maire et ancien député Gaël Yanno, en désaccord avec le président du Rassemblement-UMP Pierre Frogier sur les conséquences à tirer de la défaite du parti aux élections législatives de , fait dissidence et crée son propre parti, le Mouvement populaire calédonien (MPC). Il emporte avec lui la quasi totalité des 15 adjoints (11) et 9 des 26 autres conseillers municipaux du Rassemblement-UMP. Ensemble, ils constituent le un groupe distinct de 20 membres tout en revendiquant faire toujours partie de la majorité municipale[89],[90] (bien que Gaël Yanno et ses partisans aient réussi à faire voter le une diminution de la subvention attribuée par la mairie à la radio anti-indépendantiste, et proche politiquement du Rassemblement-UMP, Radio Rythme Bleu dite RRB, contre l'avis du maire Jean Lèques)[91]. Le , 19 autres conseillers de l'ancienne majorité restés fidèles à Jean Lèques et à la direction du Rassemblement-UMP s'unissent aux 3 élus restants de « Nouméa la diversité en mouvement » pour former un nouveau groupe de 22 membres (le maire, trois adjoints à savoir le 4e adjoint Jean-Claude Briault, le 9e Gérard Vignes et le 11e Jean-Robert Monnier qui décède en , et 18 conseillers) intitulé « Engagement pour une Calédonie dans la France » (ECF). Les trois derniers membres de l'ancien groupe Rassemblement-UMP (la 13e adjointe et historienne Christiane Terrier, les conseillers Laurent Cassier, qui finit par rejoindre le MPC, et David Tevan) refusent de prendre parti et rejoignent Philippe Blaise parmi les non-inscrits[92].
À la veille des élections municipales des 23 et , le conseil municipal est ainsi composé de trois groupes : celui de l'Engagement pour une Calédonie dans la France coprésidé par Virginie Ruffenach (Rassemblement-UMP) et Christophe Delière (LMD) avec 22 membres dont 19 du Rassemblement-UMP (le maire Jean Lèques, deux adjoints et 16 conseillers municipaux) et trois du LMD ; celui du Mouvement populaire calédonien présidé par Mireille Levy avec 21 membres (11 adjoints, 10 conseillers municipaux), allié avec l'unique élu du Mouvement républicain calédonien (Philippe Blaise continuant à siéger comme non-inscrit) au sein de l'Union pour la Calédonie dans la France (UCF, comprenant aussi, en dehors du conseil municipal, le RPC d'Isabelle Lafleur) ; celui d'opposition « Changer, c'est capital » proche de Calédonie ensemble présidé par Sonia Lagarde, avec sept membres ; deux autres élus non-inscrits (trois en comptant Philippe Blaise), dont une adjointe.
Une alternance née d'une recomposition (depuis 2014)
[modifier | modifier le code]Pour les élections municipales de 2014, les premières sans la candidature de Jean Lèques depuis 1965, trois listes principales s'opposent au sein du camp anti-indépendantiste, à savoir deux issues de la majorité sortante : celle de l'UCF, nommée « Union pour Nouméa », qui a reçu l'investiture officielle de l'UMP et qui est menée par Gaël Yanno, suivi par Isabelle Lafleur du RPC et Philippe Blaise du MRC ; celle de l'ECF (rebaptisé pour la campagne « Front pour l'unité » ou FPU), appelée « Nouméa, une ville pour tous, une ville qui bouge » et tirée par Jean-Claude Briault du Rassemblement-UMP, avec le soutien de Jean Lèques, de l'Avenir ensemble, du LMD et de Didier Leroux ; celle de Calédonie ensemble, dénommée « Avec nous, ça va changer », menée une nouvelle fois par Sonia Lagarde, désormais députée de la 1re circonscription et membre nationalement de l'Union des démocrates et indépendants (UDI) depuis 2012, associée dans un « trio » de tête durant toute la campagne avec le membre du gouvernement Philippe Dunoyer et le médecin kanak Paul Qaeze, par ailleurs président du club de football Gaïtcha FCN. S'y associent deux listes de gauche ou indépendantiste : celle dite du « Mouvement nationaliste unitaire » officiellement soutenue par le FLNKS et en son sein par l'ensemble de ses composantes à l'exception du Palika, dirigée par l'ancien conseiller municipal Jean-Raymond Postic de l'UC et ouverte à la Dynamik unitaire Sud (DUS, dissidence du Palika en Province Sud créée en 2011 par Sylvain Pabouty) et au Parti travailliste ; celle dite d'« Engagement citoyen » unissant, sur le modèle de la liste « Ouverture citoyenne » des provinciales de 2009, des dissidents de l'UC dont la tête de liste Marie-Claude Tjibaou, ainsi que le Palika et la section locale du Parti socialiste. Enfin, le petit parti non-indépendantiste Convergence pays propose lui aussi une liste, menée par Bertrand Cherrier, fils de l'ancien sénateur UDF Lionel Cherrier.
Au premier tour, Sonia Lagarde, confirmant sa progression continue au sein de l'électorat nouméen depuis 2001, arrive en tête avec 12 431 voix soit 36,28 % des suffrages, devançant de peu Gaël Yanno qui totalise 11 875 votes pour 34,66 %, tandis que Jean-Claude Briault, dernier candidat à dépasser la barre des 10 %, est distancé avec 5 284 suffrages pour 15,42 %. Comme en 2008, la division de la gauche indépendantiste l'empêche de se qualifier pour le second tour et donc d'obtenir des élus, avec 2 351 bulletins (6,86 %) pour le Mouvement nationaliste unitaire de Jean-Raymond Postic et 1 565 (4,57 %) pour l'Engagement citoyen de Marie-Claude Tjibaou. Enfin, Bertrand Cherrier n'obtient que 754 voix, soit 2,2 % des suffrages exprimés. Pour le second tour, les listes de Gaël Yanno et de Jean-Claude Briault fusionnent sous la conduite du premier, tandis que Marie-Claude Tjibaou appelle indirectement ses électeurs à voter pour Sonia Lagarde et que Jean-Raymond Postic demande aux siens de voter blanc. C'est finalement Sonia Lagarde qui emporte le duel face à Gaël Yanno, avec 17 696 voix (51,62 %) et 40 sièges sur les 53 à pourvoir, contre 16 588 (48,38 %) et 13 élus (parmi lesquels Isabelle Lafleur, Philippe Blaise et Jean-Claude Briault, ou encore l'ancienne championne olympique Félicia Ballanger) pour la liste du 1er adjoint sortant[93]. Par conséquent, le , Sonia Lagarde devient la première femme à accéder à la mairie de Nouméa, par 40 voix pour contre 13 votes blancs. Elle demande le même jour que soit conféré à son prédécesseur, Jean Lèques, le titre de maire honoraire de la ville[94]. Ce changement de majorité s'accompagne alors d'un important renouvellement de la composition du conseil municipal, avec l'élection de plusieurs personnalités connues dans d'autres milieux que celui de la politique en Nouvelle-Calédonie (comme les champions olympiques ou paralympiques Félicia Ballanger et Pierre Fairbank, la vice-championne d'Europe de natation Diane Bui Duyet, le dirigeant sportif Paul Qaeze, l'actrice Sam Kagy, entre autres).
Mais, comme lors de la mandature précédente, les groupes issus des élections sont en permanente recomposition. Tout d'abord, la majorité municipale se scinde en deux en 2015 en raison notamment du refus de Sonia Lagarde de démissionner de son mandat de député (contrairement à un engagement pris au cours de la campagne, et alors que son 3e adjoint, Philippe Dunoyer, était censé prendre sa succession à l'Assemblée nationale), d'un rythme parfois jugé trop lent dans la mise en place des réformes promises, d'une prise de distance de plus en plus affichée de la première magistrate vis-à-vis de la direction de Calédonie ensemble et d'accusations venant de certains membres de la municipalité au sujet d'un manque de concertation au sein de la majorité[95],[96]. Ainsi, le , avec cinq des quatorze autres adjoints et 15 des 25 autres conseillers municipaux issus de « Avec nous, ça va changer », Philippe Dunoyer crée son propre groupe politique au conseil, baptisé simplement « Calédonie ensemble », et en prend la direction[97]. Tout en déclarant et agissant toujours comme faisant partie de la majorité, il justifie cette scission par l'expression d'une sensibilité différente concernant l'intensité et le rythme à donner à l'application du programme de campagne : « C’est un groupe qui est là pour co-construire et proposer une optimisation du fonctionnement municipal. L’affirmation d’une sensibilité qui pense pouvoir faire des propositions, un peu mieux, un peu mieux entendues peut-être. [...] Ça va dépendre de comment ça va se passer. On va faire des propositions, on va voir si elles seront acceptées… »[98]. Ce groupe Calédonie ensemble est rejoint en par un autre adjoint, Daniel Leroux, chargé jusque-là de l'urbanisme mais qui s'est vu retirer cette délégation pour avoir exposé publiquement ses désaccords avec le maire sur plusieurs projets d'aménagement[99]. Dans l'opposition également, les choses changent, en raison surtout d'évolutions des coalitions au niveau provincial et du Congrès. En , le RPC d'Isabelle Lafleur et plusieurs dissidents du MPC (emmenés par Sonia Backès, ancienne numéro deux du parti et également conseillère municipale de Nouméa) quittent l'UCF pour s'associer aux élus du FPU dans toutes les institutions de l'archipel pour fonder des groupes appelés Les Républicains (en référence au nouveau nom pris nationalement par l'UMP). C'est donc le cas au conseil municipal de Nouméa, où ce nouveau groupe, présidé par Jean-Claude Briault du Rassemblement, est rejoint par les deux seules élues du RPC (Isabelle Lafleur et Félicia Ballanger) et deux dissidents du MPC (Sonia Backès et Gilles Ukeiwé, fils de l'ancien sénateur et fondateur du RPCR Dick Ukeiwé), faisant ainsi retomber le groupe UCF à huit membres. Puis, en , à la suite de l'alliance au niveau du Congrès du MPC avec Calédonie ensemble et Le Rassemblement dans une « Plateforme commune », Philippe Blaise et son MRC, qui s'oppose fermement à cette association et se rapproche pour sa part de Sonia Backès, décide à son tour de quitter l'UCF pour siéger comme non-inscrit. Sonia Backès et ses proches, dont Philippe Blaise mais aussi Jean-Claude Briault qui a quitté le Rassemblement, créent alors leur propre parti en , Les Républicains calédoniens, qui entretiennent des bonnes relations avec la maire Sonia Lagarde, bien qu'étant officiellement dans l'opposition. Cela aboutit à la création au niveau provincial et néo-calédonien de la coalition L'Avenir en confiance en , unissant le Rassemblement (qui n'a désormais plus de conseillers municipaux à Nouméa) aux Républicains calédoniens de Sonia Backès, au MPC et à plusieurs fidèles de Sonia Lagarde (ses adjoints Françoise Suvé et Marc Zeisel ou encore la conseillère municipale du groupe « Avec nous, ça va changer » Valérie Laroque-Daly). Si elle n'adhère pas officiellement à cette alliance, la maire de Nouméa la soutient publiquement pour les élections provinciales du qui en font la nouvelle force majoritaire du Sud et la première formation du Congrès[100].
Pour les élections municipales du , Sonia Lagarde se représente à la tête de la liste « Avec vous, pour Nouméa », qui comprend des élus du groupe « Avec nous, ça va changer » (comme les adjoints Jean-Pierre Delrieu, Chantal Bouye, Françoise Suvé, Tristan Derycke, Diane Bui Duyet, Marc Zeisel, Kareen Cornaille, et Anne-Christine Chimenti), mais aussi des personnalités de L'Avenir en confiance, que ce soit des Républicains calédoniens (la présidente d'honneur de ce parti et conseillère municipale sortante Isabelle Lafleur, les conseillers provinciaux du Sud et membres du Congrès Philippe Blaise et Naia Wateou, ou encore le champion handisport Nicolas Brignone, le conseiller municipal sortant Hnadriane Hnadriane), du Rassemblement-LR (les collaborateurs de membres du gouvernement Cindy Pralong ou Christophe Delière) ou du MPC (le candidat aux élections européennes de 2019 et secrétaire général adjoint du parti Sacha Bénisti, la collaboratrice de Gil Brial Muriel Germain). Elle s'ouvre également à des candidats de la petite liste transformiste et attrape-tout « Construire autrement », qui avait fait campagne sur les thèmes de la lutte contre la corruption et pour dépasser le clivage traditionnel pour ou contre l'indépendance aux provinciales de 2019 (la cofondatrice de l'épicerie solidaire des étudiants Vaimoe Albanese et l'ancien président du Comité jeunesse de Nouvelle-Calédonie Warren Naxue)[101]. Elle obtient une nette victoire dès le premier tour, avec 18 689 voix et 63,93 % des suffrages, soit sept fois plus que la liste arrivée deuxième, celle de Calédonie ensemble dirigée par l'avocate et nouvelle élue du Congrès Magali Manuohalalo (8,82 %, 2 élus). Elle obtient ainsi 46 sièges sur 53, avec lesquels elle se fait réélire à la tête de la municipalité le [102] Les indépendantistes, absents du conseil municipal depuis 2008, y font leur retour sous la conduite du militant de l'UC-FLNKS Joseph Boanemoa (8,82 %, 2 conseillers). Viennent ensuite deux autres élus pour le parti communautaire de L'Éveil océanien (ÉO), orienté vers la défense des intérêts des Wallisiens et Futuniens, de la conseillère provinciale et du Congrès Veylma Falaeo (7,02 %), et un seul pour Emmanuel Bérart de Générations NC, dissidence de Calédonie ensemble créée après les provinciales de 2019 (6,05 %).
À la suite des élections municipales de 2020, et à l'installation de la nouvelle municipalité en , le conseil est ainsi constitué[103] :
Groupe | Président(e) | Effectif | Statut | ||||||
---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|
Avec vous, pour Nouméa | Sonia Lagarde | 46 | majorité (maire, 12 adjoints) | ||||||
Calédonie ensemble | Magali Manuohalalo | 2 | opposition | ||||||
Unité pays | Joseph Boanemoa | 2 | opposition | ||||||
L'Éveil océanien | Veylma Falaeo | 2 | opposition constructive | ||||||
Non-inscrit | 1 | opposition (Emmanuel Bérart, GNC) |
Des communes de banlieue toujours dominées par le Rassemblement
[modifier | modifier le code]Bien qu'il ait commencé à reculer au sein de l'électorat du chef-lieu lors des élections de 2008, le Rassemblement-UMP a alors renforcé son assise sur le Grand Nouméa en conservant non seulement la commune du Mont-Dore (le maire sortant, Éric Gay, étant réélu dès le 1er tour avec 55,96 % des suffrages et 28 élus sur 35[104]) mais en remportant également celle de Dumbéa qui jusqu'alors lui avait toujours échappé (son candidat, Georges Naturel, a été élu au second tour avec 62,68 % des suffrages et 29 élus sur 35 face au maire sortant Bernard Marant[105]). La quatrième commune du Grand Nouméa, la plus rurale et la plus périurbaine, Païta, reste quant-à-elle le fief du président de l'Avenir ensemble Harold Martin qui a manqué de se faire élire au premier tour à 28 voix près avant de s'imposer assez largement au second tour avec 63,1 % des suffrages et 27 élus sur 33[106].
Ces trois maires de l'agglomération ont tous été réélus au second tour en 2014, de manière assez aisée mais avec une majorité relative pour Georges Naturel à Dumbéa (46,93 % et 26 élus sur 35 dans une quadrangulaire, contre 28,45 % et 5 sièges à l'ancien maire Bernard Marant qui menait la liste de Calédonie ensemble, 13,23 % et 2 conseillers à l'UCF de Gil Brial et 11,39 % ainsi que 2 élus à la non-indépendantiste sans étiquette Muriel Malfar-Gogo[107]) et pour Éric Gay au Mont-Dore (48,64 % et 27 sièges sur 35 dans une triangulaire, contre 35,56 % et 6 conseillers pour la liste Calédonie ensemble menée par Monique Jandot et 15,8 % pour 2 sièges aux indépendantistes de Jean-Iréné Boano[108]). En revanche, celle de Harold Martin, soutenue par l'ensemble des partis du FPU (et donc par le Rassemblement) depuis le premier tour ainsi que par ceux de l'UCF au second, l'emporte dans un duel serré l'opposant au membre du gouvernement sortant Frédéric de Greslan, de Calédonie ensemble (avec 51,98 % des suffrages et 25 élus sur 33, contre 48,02 % et 8 conseillers[109]). Ce mandat voit deux de ces maires se retirer en 2019 pour laisser leurs sièges à leurs 1ers adjoints respectifs : Harold Martin le au profit de Willy Gatuhau (premier maire d'origine wallisienne, tous deux ont rejoint entre-temps le nouveau parti loyaliste Les Républicains calédoniens de Sonia Backès, allié au Rassemblement à travers la coalition L'Avenir en confiance) ; Éric Gay le en faveur d'Eddie Lecourieux (lui-aussi membre du Rassemblement).
De nouveau, les exécutifs sortant sont reconduits au second tour en 2020, élection qui est également marquée, comme à Nouméa, par une assez forte abstention et par une certaine poussée des listes indépendantistes et des nouveaux partis (L'Éveil océanien et Générations NC), tandis que Calédonie ensemble confirme sa perte de vitesse dans le Grand Nouméa amorcée aux provinciales de l'année précédente. Ainsi, Georges Naturel obtient un troisième mandat à Dumbéa à la suite d'une nette victoire de sa liste ouverte à toutes les composantes de L'Avenir en confiance lors d'une quadrangulaire (56,86 % des suffrages et 31 sièges sur 39, suivi des 19,42 % pour 4 élus de L'Éveil océanien emmené par le membre du gouvernement Vaimu'a Muliava, 13,31 % et 2 conseillers à Générations NC de Cynthia Jan et 10,38 % avec 2 sièges également pour l'union indépendantiste de Rachel Aucher, permettant à cette famille politique d'entrer pour la première fois au conseil municipal de cette commune, alors que Calédonie ensemble n'avait présenté aucune candidature à Dumbéa)[110]. Au Mont-Dore, Eddie Lecourieux est lui-aussi confirmé sous l'étiquette L'Avenir en confiance lors d'une quadrangulaire, mais avec une majorité relative (46,04 % des voix et 26 élus sur 35, contre 28,7 % et 5 conseillers à Générations NC de Nina Julié, 16,04 % aux indépendantistes de Romuald Pidjot qui obtiennent un siège supplémentaire pour arriver à 3 élus et 9,19 % à L'Éveil océanien de Petelo Sao qui est le seul de cette liste à gagner un mandat, Calédonie ensemble avait été la seule formation éliminée au premier tour, sous la conduite de Patrick Laubreaux, avec alors 9,08 %)[111]. Enfin, Willy Gatuhau est le seul maire sortant à n'avoir pas reçu l'investiture du Rassemblement, mais sa liste réunissant toutes les autres composantes de L'Avenir en confiance (Les Républicains calédoniens et le MPC) et soutenue (sans fusion) pour le second tour par Générations NC (qui avait reçu, derrière Nicolas Fijalkowski, 9,03 % des suffrages au premier tour), l'emporte assez largement (49,89 % avec 27 des 35 conseillers municipaux, contre 30,13 % et 5 sièges pour la fusion des trois listes de L'Éveil océanien, du Rassemblement et de Calédonie ensemble tirée par Milakulo Tukumuli, et 19,96 % ainsi que 3 élus pour les indépendantistes de Louis Mapou, retrouvant une représentation municipale qu'ils avaient perdue en 1995)[112],[113].
Ces tendances se retrouvent généralement lors des autres scrutins, qu'ils soient provinciaux, législatifs, sénatoriaux, européens ou présidentiels.
Représentation provinciale, nationale et européenne
[modifier | modifier le code]Son importance démographique et son statut administratif donnent à Nouméa un rôle important dans la vie politique locale, mais relativement marginal à l'échelle nationale ou européenne. De ce fait, la participation est plus faible lors des élections présidentielles, législatives et plus encore européennes (tout en étant généralement supérieure à la moyenne néo-calédonienne) que lors des échéances locales. Sur le plan politique, l'émiettement de l'influence du RPCR a commencé à être perçue au cours des élections provinciales du , la liste anti-indépendantiste dissidente et opposée à Jacques Lafleur, l'Avenir ensemble, étant alors arrivée en tête devant le parti loyaliste traditionnel non seulement à Nouméa (avec 1159 voix d'avances), mais aussi dans deux autres communes du Grand Nouméa : Dumbéa (commune échappant jusque-là traditionnellement au RPCR) et Païta (fief d'Harold Martin, l'un des fondateurs de l'Avenir ensemble). Calédonie ensemble a, depuis sa création en 2008, augmenté progressivement son assise électorale au sein de l'agglomération. Aux élections législatives de 2012, le candidat de ce parti Philippe Gomès est arrivé en tête dans les trois communes de banlieue, tandis que Sonia Lagarde arrive deuxième au premier tour à Nouméa derrière le candidat du Rassemblement-UMP Gaël Yanno avant de s'imposer au second tour. Lors des élections législatives de 2017, Philippe Dunoyer est le premier candidat de Calédonie ensemble à arriver en tête dans la commune de Nouméa lors de ce type de scrutin.
Nouméa dans les élections provinciales néo-calédoniennes
[modifier | modifier le code]Les communes ne disposent pas d'un nombre de sièges prédéfini au Congrès de la Nouvelle-Calédonie ni dans les assemblées délibérantes des trois provinces, le scrutin se faisant à l'échelle de ces dernières à la proportionnelle plurinominale avec liste bloquée, selon la règle de la plus forte moyenne[114]. Nouméa et les trois autres communes du Grand Nouméa font partie de la Province Sud, dont l'assemblée compte 40 conseillers depuis 1999 (32 de 1989 à 1999) et qui est représentée par 32 élus sur les 54 du Congrès depuis 1989[115]. Auparavant, ces quatre communes ont formé à elles seules une des quatre régions du « Statut Fabius-Pisani » de 1985 à 1988, la Région Sud (Conseil de région de 21 élus, qui siègent également parmi les 46 membres du Congrès)[116]. Plus anciennement encore, de 1957 à 1985, Nouméa fut associée à ses deux municipalités limitrophes (Dumbéa et Mont-Dore, qui ont commencé à être progressivement intégrées à son agglomération durant cette période) ainsi qu'à deux territoires moins peuplés (Yaté et l'île des Pins) pour former l'une des quatre circonscriptions d'élection à la proportionnelle de liste de l'Assemblée territoriale de Nouvelle-Calédonie (la 1re, dite du « Sud », pourvoyant successivement 10 sièges sur 30 de 1957 à 1967, puis 16 sur 35 de 1967 à 1979, 17 sur 36 de 1979 à 1984 et sur 42 de 1984 à 1985)[117].
Le corps électoral du chef-lieu est particulièrement touché par les restrictions apportées par l'accord de Nouméa, la loi organique relative à la Nouvelle-Calédonie de 1999 et les modifications apportées en 2007 à l’article 77 de la Constitution. En effet, selon ces dispositions, seuls les citoyens néo-calédoniens, c'est-à-dire ici les personnes résidant en Nouvelle-Calédonie depuis le au minimum et leurs enfants une fois atteints l'âge de la majorité, peuvent participer au scrutin (il est question de « corps électoral gelé »)[118],[119]. Or, l'agglomération accueillant l'essentiel de l'immigration venant de la France métropolitaine ou du reste de l'Outre-mer, beaucoup de ses résidents se retrouvent exclus de cette liste électorale spéciale. Ainsi, en 2014, ils étaient 57 506 inscrits (incluant citoyens français mais aussi d'autres pays de l'Union européenne) pour le second tour des élections municipales à Nouméa le [93], contre 44 092 pour les élections provinciales du suivant[120]. Ce sont ainsi plus de 13 000 électeurs de Nouméa qui ne sont pas inscrits pour voter à ce scrutin, soit environ 23,3 % de la liste générale du chef-lieu. De plus, beaucoup d'habitants de l'agglomération continuent à être inscrits dans une autre commune, tout particulièrement dans les îles Loyauté (il y a ainsi plus d'électeurs inscrits dans cette province en 2014 que d'habitants recensés la même année). Par conséquent, le poids électoral de Nouméa est moins écrasant que sa démographie, puisqu'elle représente 43,1 % des inscrits de la Province Sud pour un peu moins de la moitié de sa population (contre respectivement 41,8 % et 39,8 % dans le reste du Grand Nouméa, ainsi que 15,1 % et 10,2 % pour le Sud rural)[120].
Quoi qu'il en soit, Nouméa et son agglomération occupent toujours une place importante dans la politique provinciale. Au , ce sont 18 des 40 conseillers provinciaux du Sud qui sont implantés à Nouméa, dont 15 des 32 élus qui sont également membres du Congrès (indiqués en gras). Sont également spécifiés en italique ceux qui sont par ailleurs conseillers municipaux[103],[121] :
- Sonia Backès (présidente de l'assemblée, LOY-LRC)
- Marie-Jo Barbier (LOY-MPC)
- Philippe Blaise (1er vice-président, LOY-LRC-MRC)
- Guy-Olivier Cuénot (APS-RN)
- Philippe Dunoyer (député, CE)
- Veylma Falaeo (L'ÉO)
- Jean-Gabriel Favreau (LOY-LRC)
- Magali Manuohalalo (CE)
- Philippe Michel (CE)
- Sylvain Pabouty (DUS)
- Annie Qaézé (CE)
- Virginie Ruffenach (APS-Rassemblement-LR)
- Alésio Saliga (LOY-LRC)
- Christiane Saridjan-Verger (LOY-LRC)
- Françoise Suvé (LOY-LRC)
- Julien Tran Ap (LOY-MPC)
- Léa Tripodi (LOY-MPC)
- Naia Wateou (LOY-LRC)
Les trois autres communes du Grand Nouméa disposent pour leur part, au , de 14 conseillers provinciaux dont 12 également membres du Congrès (en gras, les conseillers municipaux étant en italique)[121],[122],[123] :
- Gil Brial (2e vice-président, LOY-MPC, Dumbéa)
- Brieuc Frogier (LOY-ex-Rassemblement-LR, Mont-Dore)
- Nadine Jalabert (APS-Rassemblement-LR, Mont-Dore)
- Nina Julié (LOY-G-NC, Mont-Dore)
- Maria-Isabella Lutovika (L'ÉO, Mont-Dore)
- Muriel Malfar-Pauga (LOY-LRC, Dumbéa)
- Lionel Paagalua (APS-Rassemblement-LR, Mont-Dore)
- Marie-Line Sakilia (FLNKS-UC, Païta)
- Aloïsio Sako (FLNKS-RDO, Dumbéa)
- Petelo Sao (L'ÉO, Mont-Dore)
- Ithupane Tieoué (FLNKS-UNI-Palika, Dumbéa)
- Aniseta Tufele (APS-Rassemblement-LR, Païta)
- Milakulo Tukumuli (3e vice-président, L'ÉO, Dumbéa-Païta)
- Rock Wamytan (président du Congrès, FLNKS-UC, Mont-Dore)
Représentation parlementaire nationale
[modifier | modifier le code]Depuis 1988, Nouméa est incluse dans la première circonscription de Nouvelle-Calédonie, avec l'île des Pins et les trois communes des îles Loyauté, élisant un député à l'Assemblée nationale au scrutin uninominal majoritaire à deux tours pour un mandat de cinq ans. Elle en constitue l'essentiel de l'électorat, regroupant ainsi 70,8 % des électeurs inscrits de cette circonscription lors du premier tour des législatives de 2012[124],[125], 73,3 % en 2017[126],[127], 75,1 % en 2022[128],[129] et 74,9 % en 2024[130],[131]. De ce fait, la circonscription a toujours, depuis sa création, été représentée par un non-indépendantiste, tous sauf un ayant cumulé au moins momentanément leur mandat parlementaire avec celui de conseiller municipal du chef-lieu, voire d'adjoint pour Gaël Yanno de 2007 à 2012 et Philippe Dunoyer en 2017 et de maire pour Sonia Lagarde de 2014 à 2017. Le titulaire du siège au sein de la XVIIe législature depuis 2024 est Nicolas Metzdorf, le premier « Broussard » élu député de cette circonscription après avoir été celui de la 2e pendant deux ans, président fondateur du parti Générations NC, membre nationalement de La République en marche puis de Renaissance et du groupe Ensemble pour la République. La liste des députés de cette circonscription depuis 1988 est inscrite dans le tableau ci-dessous, montrant une évolution politique comparable à celle des résultats aux élections municipales.
No | Nom | Début du mandat | Fin du mandat | Législatures | Appartenance politique | Groupes parlementaires | Notes |
---|---|---|---|---|---|---|---|
1 | Jacques Lafleur | [132] | IXe, Xe, XIe, XIIe | RPCR (jusqu'en 2006) RPC (à partir de 2006) | RPR (1988-2002) UMP (2002-2007) | Président de l'Assemblée de la Province Sud (1989-2004), Conseiller municipal de Nouméa (1983-1997), Signataire des accords de Matignon-Oudinot (1988) puis de Nouméa (1998). | |
2 | Gaël Yanno | XIIIe | Rassemblement-UMP | UMP | 1er adjoint au maire de Nouméa. | ||
3 | Sonia Lagarde | XIVe | CE-UDI | UDI | Maire de Nouméa (à partir de 2014). | ||
4 | Philippe Dunoyer | XVe, XVIe | CE UDI (2017-2022) RE (2022-2024) HOR (2024) | LC/UAI/UDI (2017-2022) RE (2022-2024) | 3e adjoint au maire de Nouméa (2014-2017), Porte-parole du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie (2016-2017) | ||
5 | Nicolas Metzdorf | en cours | XVIIe | Générations NC RE | EPR | Député sortant de la 2e circonscription (2022-2024) |
Auparavant, la ville a été incluse dans une circonscription unique correspondant à l'ensemble de la Nouvelle-Calédonie pour un seul député au vote majoritaire de 1945 à 1978 (avec un député nouméen entre 1945 et 1964, à savoir successivement Roger Gervolino de 1945 à 1951 puis Maurice Lenormand de 1951 à 1964) puis pour deux représentants à la proportionnelle de 1986 à 1988 (l'un des deux sièges étant alors occupé par un conseiller municipal du chef-lieu, Jacques Lafleur). En dehors de ces périodes, Nouméa a fait partie de l'ancienne deuxième circonscription de Nouvelle-Calédonie, dite « circonscription Ouest » car s'étendant sur l'ensemble de la côte Ouest de la Grande Terre, de 1978 à 1986, aux côtés notamment de ses banlieues naissantes du Grand Nouméa. Le député est alors le nouméen Jacques Lafleur.
Pour les élections sénatoriales, Nouméa, en tant que commune de plus de 30 000 habitants, dispose comme grands électeurs de la totalité de ses conseillers municipaux (soit 53 depuis 2008) et de délégués supplémentaires élus par ces derniers à raison de 1 pour 800 habitants en sus de 30 000[133]. Ils étaient ainsi, pour le renouvellement de 2017, 140 délégués du chef-lieu (53 titulaires membres du conseil municipal et 87 supplémentaires, auxquels s'ajoutaient 29 suppléants), soit environ le quart des grands électeurs néo-calédoniens (25,4 %). S'y ajoutaient les 37 représentants de Dumbéa (35 conseillers municipaux et 2 délégués supplémentaires, avec 10 suppléants), les 35 élus communaux du Mont-Dore (avec 9 suppléants) et les 33 de Païta (avec 9 suppléants), soit un peu moins du cinquième (19,02 %) du collège électoral[134]. Ils élisent (avec leurs homologues des autres communes, les 76 conseillers provinciaux, les quatre parlementaires en fonction) deux sénateurs (un seul avant 2011) pour l'ensemble de la Nouvelle-Calédonie pour un mandat de six ans au scrutin plurinominal majoritaire à deux tours. Si les trois premiers élus à la chambre haute du Parlement français (Henri Lafleur de 1947 à 1955 et de 1959 à 1974, Armand Ohlen de 1955 à 1959 et Lionel Cherrier de 1974 à 1983) étaient par ailleurs implantés politiquement à Nouméa, aucun de leurs successeurs à partir de 1983 n'est venu de la capitale. Depuis 2011, deux d'entre eux, Pierre Frogier, ancien président du Rassemblement et élu de 2011 à 2023, puis Georges Naturel, militant de ce dernier parti mais qui n'en avait pas reçu l'investiture et qui a été élu en 2023, membres des groupes UMP puis Les Républicains, ont fait leur carrière politique locale dans le Grand Nouméa, en tant qu'anciens maires du Mont-Dore de 1987 à 2001 et de Dumbéa de 2008 à 2023 respectivement.
Un bastion de la droite pour les élections présidentielles
[modifier | modifier le code]Sur le plan national, les enjeux des élections présidentielles restent dominés à Nouméa comme dans le reste de la Nouvelle-Calédonie, par la question de l'avenir institutionnel de l'archipel. Par ailleurs, Nouméa est, avec Farino, l'une des communes où les électeurs participent le plus à l'élection présidentielle (au-delà de 70 % des inscrits au premier tour et de 75 % au second, allant jusqu'à respectivement 83,19 % et 85,56 % en 1988), avec, comme dans le reste du territoire national, des baisses légères pour le second tour de 2002 et aux deux tours de 2007 mais plus importantes en 2022 (avec le taux de participation le plus bas de l'histoire électorale récente de l'archipel pour ce type de scrutin ainsi que, pour la première fois, moins de la moitié des électeurs inscrits s'étant déplacés pour voter, soit au premier tour 45,63 % remontant légèrement à 47,24 % au deuxième tour), au premier tour de 2002 (61,33 %) et en 2017 (62,95 % au premier tour et, pour la première fois, une participation encore plus faible au second tour, à 62,85 %).
L'électorat nouméen est nettement ancré à droite, du fait du lien historique depuis les années 1970 de celle-ci avec l'anti-indépendantisme en Nouvelle-Calédonie. Plus particulièrement, cette tendance s'exprime généralement au profit du Rassemblement pour la République (RPR) jusqu'en 2002 puis de l'Union pour un mouvement populaire (UMP) devenue en 2015 Les Républicains (LR), formations soutenues localement non seulement par le RPCR devenu ensuite le Rassemblement-UMP puis le Rassemblement-LR, mais aussi par la plupart des personnalités dirigeantes des autres partis non-indépendantistes. Jusqu'en 2022, leurs candidats sont tous largement arrivés en tête au premier tour, souvent avec une majorité des suffrages exprimés (Jacques Chirac en 1988, avec alors le plus haut score jamais obtenu dans la ville au premier tour de ce scrutin, soit 73,4 %[135], puis en 2002, avec 54,11 %[136], et Nicolas Sarkozy en 2007, avec 60,55 %[137],[138], ainsi qu'en 2012, avec 57,44 %[139]), ou presque (Jacques Chirac en 1995, avec 49,14 %, alors qu'il doit faire face à un autre candidat du même camp, Édouard Balladur, soutenu localement par Jacques Lafleur, qui arrive pour sa part deuxième avec 26,54 %[140]). Les candidats issus de cette famille politique ayant obtenu le moins bon score à Nouméa sont Valérie Pécresse avec seulement 5,43 % des suffrages en 2022, suivie par François Fillon qui, touché par une affaire durant sa campagne, obtient 35,04 % des voix en 2017[141],[142]. Lors des seconds tours, Nouméa est régulièrement l'une des communes françaises votant le plus pour le candidat de droite, avec un résultat frôlant l'unanimité en 1988 (94,13 % des suffrages exprimés et 79,8 % des inscrits pour Jacques Chirac, alors que la campagne a été marquée par la prise d'otages d'Ouvéa)[135] et toujours supérieur aux trois quarts des voix (à l'exception de 2017 et 2022, François Fillon puis Valérie Pécresse ayant été éliminés au premier tour au plan national) avec 87,8 % en 1995[140] puis 79,45 % en 2002[136] pour Jacques Chirac, 80,25 % en 2007[137] puis 77,4 % en 2012[143] pour Nicolas Sarkozy.
Les candidats successifs du Front national, Jean-Marie Le Pen jusqu'en 2007 puis Marine Le Pen, sont arrivés en deuxième position au premier tour en 1988, en 2002, en 2017 et en 2022. De plus, si Jean-Marie Le Pen se place troisième en 1995, le FN est alors bien la deuxième force politique de cette élection puisque les deux candidats arrivés en tête sont issus du même parti, le RPR. En dehors de cela, Jean-Marie Le Pen est quatrième en 2007, derrière les candidats de droite (Nicolas Sarkozy), du centre (François Bayrou) et de gauche (Ségolène Royal), et Marine Le Pen est troisième en 2012, derrière Nicolas Sarkozy et François Hollande. Quoi qu'il en soit, à l'exception du score réalisé en 2017, le pourcentage de voix obtenu reste alors inférieur aux résultats nationaux de ces candidats, confirmant le poids électoral modeste du Front national dans la commune (le parti ne dispose que de deux conseillers municipaux dans le chef-lieu de 1989 à 2008, et n'y est plus représenté depuis) en oscillant entre 13 % et 14 % (13,64 % en 1988[135], 13,98 % en 2002[136] et 13,33 % en 2012[139]). Il retombe d'ailleurs à 10,48 % en 1995[140] et surtout à 6,7 % en 2007[137]. Lors de l'élection de 2017, Marine Le Pen a cependant effectué le meilleur score obtenu par un candidat d'extrême droite dans cette commune, avec 27,55 % au premier tour (légèrement moins que le score obtenu dans l'ensemble de la Nouvelle-Calédonie), et réussit à faire de Nouméa la plus grande ville de France à avoir voté majoritairement pour la présidente frontiste au second tour (à 50,9 %)[141]. Lors des deux tours de scrutin, la percée de la candidate frontiste est tout particulièrement sensible dans les quartiers populaires du Nord et de l'Ouest de la presqu'île. Les médias locaux ainsi que la plupart des responsables non-indépendantistes interprètent cette montée non pas comme une « adhésion aux thèses de Marine Le Pen » mais comme un « message » adressé à l'État pour qu'il réponde à l'insécurité de plus en plus ressentie dans le Grand Nouméa, comme un « rappel » de l'attachement d'une majorité des électeurs au maintien de l'archipel dans la France, comme un rejet exprimé par beaucoup de loyalistes vis-à-vis de candidats de « gauche » (intégrant Emmanuel Macron à ce camp) toujours perçus comme favorables à l'indépendance de l'archipel (même si ce réflexe a eu tendance à s'estomper progressivement depuis le début du XXIe siècle), ou encore comme une inquiétude au sujet de l'application de l'accord de Nouméa et de l'avenir institutionnel[144],[145]. De même, certains analystes (comme le docteur en géopolitique Pierre-Christophe Pantz) estiment que le nombre important d'abstentionnistes (37,05 % au premier tour, 37,15 % au second), de votes blancs (1,93 % des inscrits mais surtout 5,31 % au second tour) et nuls (0,52 % puis 1,4 %)[141] a pu aider à gonfler le score de Marine Le Pen[146]. De plus, cette percée apparaît momentanée puisque, dès le premier tour des élections législatives en juin suivant, la candidate du FN, Lina Balmelli, retombe à 7,63 % des suffrages exprimés (avec une abstention particulièrement importante, à 59,15 % des inscrits)[126]. D'ailleurs, Marine Le Pen, de nouveau candidate, revient au premier tour de la présidentielle de 2022 à un résultat plus proche de ceux traditionnellement obtenus par sa famille politique dans la ville, à savoir 17,5 % des voix (auxquels peuvent s'ajouter cependant les 10,99 % des votes réalisés par Éric Zemmour). Au second tour de ce scrutin, elle ne récolte que 36,35 % des suffrages exprimés dans la commune[142].
La gauche est pour sa part traditionnellement faiblement implantée à Nouméa, mais a connu une légère progression depuis les années 2000. Le score des candidats passe ainsi de 5,42 % des suffrages au premier tour pour six candidats (dont 3,82 % et le quatrième résultat pour François Mitterrand) puis 5,87 % au second pour le président sortant en 1988[135] à celui cumulé de 15,95 % répartis entre quatre candidats au premier tour de 2017 (à savoir Jean-Luc Mélenchon qui arrive quatrième et triple son score de 2012 avec 9,72 %, Benoît Hamon qui obtient alors le plus mauvais score pour un candidat du PS en vingt-neuf ans avec 4,34 %, Philippe Poutou avec 1,16 % et Nathalie Arthaud avec 0,73 %)[141] puis à 17,46 % entre six prétendants au premier tour de 2022 (Jean-Luc Mélenchon, encore une fois quatrième mais qui augmente de nouveau son résultat avec 10,12 %, Yannick Jadot avec 4,29 %, Anne Hidalgo qui fait davantage chuter le résultat du PS à 1,32 %, Philippe Poutou à 0,62 %, Fabien Roussel à 0,57 % et Nathalie Arthaud à 0,54 %)[142]. Entretemps, Ségolène Royal est la première socialiste à dépasser la barre des 10 % au premier tour (11,24 %, pour monter ensuite à 19,75 % au second tour) en 2007[137] puis François Hollande est le premier à se placer deuxième dans le chef-lieu néo-calédonien, loin derrière Nicolas Sarkozy, en 2012 avec 13,5 % des suffrages exprimés et à dépasser le cinquième des électeurs s'étant exprimés (22,6 %) au second tour[139],[143]. Si ce sont toujours les dirigeants indépendantistes qui font essentiellement campagne pour les candidats du Parti socialiste et si la section locale de ce dernier s'associe généralement aux formations séparatistes lors des municipales et des provinciales, le fait que la question néo-calédonienne ait cessé d'être un enjeu de la politique nationale (tous les candidats aux présidentielles depuis la signature de l'accord de Nouméa, à l'exception de ceux du FN, s'engageant à respecter l'accord de Nouméa et à conserver la position neutre adoptée par l'État) a pu faire évoluer ce schéma classique. De plus, plusieurs personnalités issues ou proches de ce camp ont publiquement exprimé un choix « personnel » ou de « cœur » pour le maintien de l'archipel dans la République française (Michel Rocard[147],[148], Emmanuel Macron[149],[150],[151], voire Jean-Luc Mélenchon[152]). Allant dans le sens de cette évolution, la fédération néo-calédonienne du PS, qui change alors son nom pour devenir Les Progressistes, appelle officiellement à voter « non » à l'indépendance[153].
D'ailleurs, une partie assez importante des dirigeants du centre-droit ou de la droite loyaliste nouméenne ou grand nouméenne, d'abord méfiante à son égard, a rallié progressivement La République en marche et Emmanuel Macron. C'est le cas surtout, dès le 1er tour de l'élection de 2017, de la maire du chef-lieu Sonia Lagarde[154], de la conseillère municipale Isabelle Lafleur - toutes deux ayant été nommées par la direction nationale de LREM responsables de son comité politique local en [155] - ou encore de l'un des principaux collaborateurs de Sonia Backès, Christopher Gygès[156]. Alors peu connu localement et représentant une offre politique nouvelle, différente des clivages politiques traditionnels en Nouvelle-Calédonie, il arrive toutefois à se classer troisième du premier tour avec 14,28 % et monte jusqu'à 49,1 % au second tour. Par la suite, après la visite d'Emmanuel Macron en , d'autres personnalités le rejoignent, surtout parmi la jeune garde de Calédonie ensemble qui va contribuer un an plus tard à la création de la dissidence Générations NC (la mont-dorienne Nina Julié et la dumbéenne Cynthia Jan, par exemple) ou qui vont rester au contraire fidèles au parti de Philippe Gomès (comme les conseillers municipaux de Nouméa Annie Qaézé et Pierre Fairbank)[157],[158]. Enfin, la gestion par l'État de la pandémie de Covid-19 (surtout à partir de la détection du variant dit « Delta » et des premiers décès liés à cette maladie dans l'archipel en ) et l'organisation du dernier référendum prévu par l'accord de Nouméa sur la question de l'indépendance le , jugées positivement par la classe politique non-indépendantiste, entraînent une nouvelle vague de ralliement pour le président sortant en vue de l'élection présidentielle de 2022. C'est le cas tout particulièrement en de la présidente de l'assemblée provinciale du Sud, dirigeante des Républicains calédoniens et ancienne conseillère municipale de Nouméa, Sonia Backès[159], et le mois suivant du député UDI et porte-parole de Calédonie ensemble Philippe Dunoyer (comme les deux autres parlementaires issus de son parti)[160]. Ainsi, avant même la déclaration officielle de candidature de l'intéressé, un comité de soutien est créé à la fin du mois de sous la présidence de Sonia Lagarde et la coordination de Christopher Gygès, et où se retrouvent plusieurs autres membres du conseil municipal de Nouméa (les adjoints Jean-Pierre Delrieu et Françoise Suvé ou la conseillère Isabelle Lafleur pour la majorité, ainsi qu'Emmanuel Bérart de Générations NC pour l'opposition), des élus des autres communes du Grand Nouméa (le maire Les Républicains calédoniens de Païta Willy Gatuhau, les conseillères Nina Julié et Cynthia Jan pour Générations NC) ou des membres nouméens du Congrès (Alesio Saliga des Républicains calédoniens)[161]. Cela permet au président sortant d'arriver largement en tête de l'élection de 2022, avec 42,98 % des suffrages exprimés au premier tour puis 63,35 % au deuxième tour[142].
Candidats ayant obtenu plus de 5 % des suffrages exprimés :
Candidat | 1er tour | 2e tour | ||
---|---|---|---|---|
Nouméa | National | Nouméa | National | |
Nicolas Sarkozy | 60,55 % | 31,18 % | 80,25 % | 53,06 % |
Ségolène Royal | 11,24 % | 25,87 % | 19,75 % | 46,94 % |
François Bayrou | 12,42 % | 18,57 % | ||
Jean-Marie Le Pen | 6,7 % | 10,44 % | ||
Votants | 76,32 % | 83,77 % | 78,07 % | 83,97 % |
Candidat | 1er tour | 2e tour | ||
---|---|---|---|---|
Nouméa | National | Nouméa | National | |
François Hollande | 13,5 % | 28,63 % | 22,6 % | 51,64 % |
Nicolas Sarkozy | 57,44 % | 27,18 % | 77,4 % | 48,36 % |
Marine Le Pen | 13,33 % | 17,90 % | ||
Jean-Luc Mélenchon | 3,61 % | 11,10 % | ||
François Bayrou | 6,48 % | 9,13 % | ||
Votants | 68,57 % | 79,48 % | 71,58 % | 80,35 % |
Candidat | 1er tour | 2e tour | ||
---|---|---|---|---|
Nouméa | National | Nouméa | National | |
Emmanuel Macron | 14,28 % | 24,01 % | 49,1 % | 66,10 % |
Marine Le Pen | 27,55 % | 21,30 % | 50,9 % | 33,90 % |
François Fillon | 35,04 % | 20,01 % | ||
Jean-Luc Mélenchon | 9,72 % | 19,58 % | ||
Benoît Hamon | 4,34 % | 6,36 % | ||
Votants | 62,95 % | 77,77 % | 62,85 % | 74,56 % |
Candidat | 1er tour | 2e tour | ||
---|---|---|---|---|
Nouméa | National | Nouméa | National | |
Emmanuel Macron | 42,98 % | 27,85 % | 63,35 % | 58,54 % |
Marine Le Pen | 17,5 % | 23,15 % | 36,65 % | 41,46 % |
Jean-Luc Mélenchon | 10,12 % | 21,95 % | ||
Éric Zemmour | 10,99 % | 7,07 % | ||
Valérie Pécresse | 5,43 % | 4,78 % | ||
Votants | 45,63 % | 73,69 % | 47,24 % | 71,99 % |
Nouméa et l'Europe
[modifier | modifier le code]Comme la droite néo-gaulliste à laquelle il reste fortement lié, l'électorat nouméen a évolué sur la question de l'intégration européenne, tout en se mobilisant peu lors des différents scrutins portant sur le sujet. Il est ainsi passé d'un certain euroscepticisme, en votant majoritairement « non » au référendum sur le traité de Maastricht du (Jacques Lafleur ayant lui-même rallié les positions de Charles Pasqua et Philippe Séguin, le vote du chef-lieu a alors contribué à faire de la Nouvelle-Calédonie la seule collectivité ultramarine à voter contre ce texte)[162], à une certaine europhilie. En effet, en témoigne la mobilisation plus importante qu'ailleurs en Nouvelle-Calédonie pour le référendum sur le traité établissant une constitution pour l'Europe du (avec une participation à Nouméa supérieure à 50 %, quand elle n'est que de 15 % dans le Nord et de 12 % aux Loyauté) et, cette fois, pour choisir assez massivement le « oui »[163].
Si, territorialement, comme le reste de la Nouvelle-Calédonie, en tant que pays et territoire d'outre-mer (PTOM), Nouméa ne fait pas partie de l'Union européenne, ses habitants sont des citoyens participant aux élections du Parlement européen depuis 1979. Plus particulièrement, la ville est incluse dans la circonscription Outre-Mer qui dispose de trois députés européens élus au scrutin proportionnel de liste à un tour depuis sa création en 2004 jusqu'à sa disparition en 2019 (avant 2004 et après 2019, il n'existe aucune circonscription, les listes étant présentées à l'échelle nationale) et, en son sein, de la section Pacifique qui détient obligatoirement un de ces trois sièges à partir de sa mise en place en 2009. Les taux de participation restent assez faibles, m