Quatre piliers de Transnistrie — Wikipédia

La déclaration d'indépendance de la Transnistrie du 2 septembre 1990 repose sur les Quatre piliers suivants :

  1. Autodétermination ;
  2. Histoire séparée de la Transnistrie de la Moldavie ;
  3. Caractère distinctif réel ;
  4. Annulation des conséquences du Pacte germano-soviétique de 1940.

La Moldavie interprète différemment les « quatre piliers » et conteste le statut de la Transnistrie car pour les autorités moldaves, pour l'ONU, pour le droit international et même pour la Russie, elle est un État non reconnu internationalement.

Depuis la guerre du Dniestr (1992), la La Transnistrie, grâce au soutien militaire russe est de facto un territoire occupé par la Russie. La Transnistrie est également connue comme Pridnestrovie (« près du Dniestr », appellation usuelle russe). Le nom Transnistrie (« au-delà du Nistre », appellation usuelle moldave francisée) n'est pas officiel car le nom officiel est République moldave du Dniestr (RMD, en moldave/roumain Република Молдовеняскэ Нистрянэ - Republica Moldovenească Nistreană, en russe Приднестровская Молдавская Республика et en ukrainien Придністровська Молдавська Республіка soit ПМР - PMR). En 1990, lorsque la Moldavie déclare son indépendance, la Transnistrie choisit de rester membre de l'Union des républiques socialistes soviétiques et en 1991, lorsque se produit la dislocation de l'URSS, elle proclame son indépendance alors que selon le droit international, elle devrait être une région autonome de la Moldavie, et c'est le statut que lui proposent les autorités moldaves. Mais la Transnistrie fait partie des territoires occupés par la Russie et a obtenu la reconnaissance diplomatique de trois États post-soviétiques et pro-russes non reconnus : l'Abkhazie, l'Ossétie du Sud et, jusqu'à sa disparition en 2023, l'ancien Artsakh.

Argumentation des Quatre Piliers

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  1. L'autodétermination est le concept selon lequel, selon les mots du président des États-Unis Woodrow Wilson, aucun peuple ne doit être contraint à une souveraineté sous laquelle il ne souhaite pas vivre. La Transnistrie soutient que puisque la majorité des pays d'aujourd'hui ont été fondés sur le principe de l'autodétermination, ils ont eux aussi ce droit moral.
  2. L'histoire distincte de la Transnistrie de la Moldavie fait référence au fait que la Transnistrie n'a jamais fait partie de la Principauté de Moldavie, mais de la Podolie, le fleuve Dniestr formant la frontière internationale entre les deux entités historiques. La Transnistrie soutient donc que la revendication de la Moldavie sur la Transnistrie n'est pas étayée par l'histoire.
  3. La spécificité réelle consiste à démontrer que la Transnistrie, à majorité slave depuis plus d'un millénaire, a peu de choses en commun avec la Moldavie, à majorité latine[1],[2]. Les deux diffèrent également par les alphabets.
  4. L'annulation du pacte Molotov-Ribbentrop est l'argument juridique selon lequel le seul lien entre la Moldavie et la Transnistrie serait l'annexion forcée de 1940 de la Moldavie orientale par l'URSS, mais que cette annexion a été déclarée nulle et non avenue par la Moldavie elle-même dans sa proclamation d'indépendance en 1990. Cela, fait valoir la Transnistrie, annule également toute revendication territoriale obtenue à la suite du pacte en raison du principe juridique du statu quo ante bellum : dans ce cas « frontière sur le Dniestr ».

Objections moldaves

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  1. Pour que le « principe d'autodétermination » s'applique selon le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes et le droit moral, il faudrait qu'un référendum puisse avoir lieu non pas sous la « protection » russe et dans un système politique autoritaire comme cela a été le cas depuis trente ans[3],[4], mais dans une totale liberté d'expression et d'action de tous les citoyens, sous l'égide d'observateurs internationaux neutres délégués par l'ONU et sans pressions politiques ou économiques d'aucune sorte[5],[6].
  2. S'il est exact que la Transnistrie n'a jamais fait partie de la Principauté de Moldavie, le fleuve Dniestr n'a jamais été une « infranchissable frontière » avec la Podolie : des Slaves se sont installés en Moldavie et des Moldaves en Podolie, et c'est même pour cela qu'en 1924 les autorités soviétiques y ont créé une République socialiste soviétique autonome moldave, matrice de la future République socialiste soviétique moldave établie sur les deux rives du fleuve en 1940[7].
  3. La notion de « spécificité réelle » fait fi non seulement du point qui précède, mais aussi de l'identité religieuse entre les deux rives du Dniestr[8], de l'existence des Volochovènes aux XIe – XIIIe siècles[9], fruits d'une « osmose millénaire entre slaves et romans »[10], et également du destin commun des deux entités à l'époque soviétique[11].
  4. L'« annulation des conséquences du pacte Hitler-Staline » et le retour au principe juridique du statu quo ante bellum de la « frontière sur le Dniestr » signifierait aussi l'obligation, pour l'Ukraine, de céder à la Moldavie les régions historiquement moldaves puis roumaines entre 1918 et 1940 de l'oblast de Tchernivtsi et du Boudjak, sans compter la question des frontières orientales de la Pologne et les transferts de population qui ont eu lieu depuis 1940, ce qui bouleverserait la vie de millions de personnes[12].

Notes et références

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  1. (en) Giorgio Comai et Bernardo Venturi, « Language and education laws in multi-ethnic de facto states: the cases of Abkhazia and Transnistria », Nationalities Papers,‎ (DOI 10.1080/00905992.2015.1082996, lire en ligne, consulté le ).
  2. (ru) Ivan Tynyaev, « Перепись населения ПМР » [« Recensement de la population de la RMP »] [archive], sur NewsPMR.Com,‎ (consulté le ).
  3. « Transnistrische Moldawische Republik (Moldawien), 17. September 2006 : Verzicht auf Unabhц╓ngigkeit - [in German] », Sudd.ch (consulté le )
  4. « Transnistrische Moldawische Republik (Moldawien), 17. September 2006 : Unabhц╓ngigkeitskurs und Beitritt zu Russland - [in German] », Sudd.ch (consulté le )
  5. (en) Steven D. Roper, « Regionalism in Moldova: the case of Transnistria and Gagauzia », Regional & Federal Studies, vol. 11, no 3,‎ , p. 101–122 (DOI 10.1080/714004699, S2CID 154516934, lire en ligne, consulté le ).
  6. (en) Natalia Cojocaru, « Nationalism and identity in Transnistria », Innovation: The European Journal of Social Science Research, vol. 19, nos 3-4,‎ , p. 261–272 (DOI 10.1080/13511610601029813, S2CID 53474094, lire en ligne, consulté le ).
  7. Gheorghe Negru : La politique ethno-linguistique en RSS de Moldavie, éd. Prut international, Chişinău 2000 ; voir aussi Controverse identitaire en République de Moldavie.
  8. Par exemple le moldave Pierre Movilă (1596-1646) fut métropolite de l'Ukraine : voir Michel Heller : Histoire de la Russie et de son Empire, chap. 10, 2015, Éd. Tempus Perrin, (ISBN 978-2262051631).
  9. Chronique d'Ipatiev, Saint-Pétersbourg, 1843, 392 pages (comprend également la Chronique de Goustynia) sur Googlebooks; 2e éd. Chroniques du manuscrit d'Ipatiev, 1871, 706 p.; Vol. 2, Chronique d'Ipatiev, 2e ed. Ed. Chakhmatov, Saint-Pétersbourg, 1908, Moscou, 1962, 3e éd, n° 1, Ed. Chakhmatov, Pétrograd, 1923 et avec une introduction de BM Kloss, ЯРК, Moscou, 1998, 648 p., (ISBN 5-7859-0057-2), réimpression: Moscou 2001, 674 p.
  10. Jean Gacon : En remontant le cours de l'histoire et Jacques Fournier : Au pays des vignobles in "France-U.R.S.S. Magazine" n° 132 (389), 1981.
  11. Matei Cazacu et Nicolas Trifon (éds), La Moldavie ex-soviétique : histoire et enjeux actuels, éd. Acratie, Paris 1993
  12. (en) Norman Davies, Europe : a History, Oxford/New York, Oxford University Press, (ISBN 0-19-820171-0, lire en ligne), p. 1001

Articles connexes

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Liens externes

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Bibliographie

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  • Florent Parmentier, « La Transnistrie Politique de légitimité d'un Etat de facto », Le Courrier des Pays de l'Est, vol. 2007/3, no 1061,‎ , p. 69-75 (lire en ligne, consulté le ).