Raymond et Monique Martinot — Wikipédia
Raymond et Monique Martinot est un couple français ayant procédé à une cryonigénisation. Cette pratique étant illégale en France, le fils et exécuteur testamentaire, Rémy Martinot, entame une procédure judiciaire pour faire respecter ce choix de sépulture qui fera l'objet de nombreux commentaires juridiques.
Faits
[modifier | modifier le code]En 1984, Raymond Martinot décide de conserver le corps de son épouse, Monique Martinot (née Leroy) morte à 49 ans d'un cancer, dans un caisson réfrigéré dans une crypte de la maison familiale, dans le Maine-et-Loire. Il souhaite le même sort pour lui-même. Médecin généraliste, gynécologue[1] et ancien chargé de cours à la faculté de médecine de Paris, Raymond Martinot croit aux vertus de la cryogénie et espère que les avancées de la science permettraient un jour de le réanimer ainsi que sa défunte compagne[2]. Dans son château de Nueil-sur-Layon, en Maine-et-Loire, il conçoit un congélateur en inox capable de maintenir une température de −62 °C. Il ne suit pas alors le courant américain de la cryogénie avec azote liquide et gros moyens financiers qui recommande une température à - 196 degrés pour conserver un corps humain[1].
Raymond Martinot reçoit de nombreux médias pour expliquer sa croyance au progrès de la science et plus particulièrement en la cryobiologie. Dans un document INA en 1985, il précise que le choix d’être cryogénisé est un commun accord du couple, détaille les conditions techniques de conservation du corps de son épouse et espère la « résurrection » de celle-ci en 2030[3]. Lors d'une émission à la télévision anglaise en 1987, il déclare « Entre zéro (la destruction totale) et l'infini, je choisis l'infini »[4].
Grâce à une fiche d'instructions détaillée, son fils Rémy Martinot procède à la cryonigénisation de son père décédé en 2002[5].
Procédure judiciaire
[modifier | modifier le code]Après le décès de Raymond Martinot en 2002, le préfet, arguant d’un « trouble manifestement illicite », ne répondent pas aux mesures d'hygiène et contraire aux pratiques funéraires en vigueur demande l’inhumation du couple et exige l'arrêt de l'expérience[6]. Selon la préfecture, le docteur Martinot aurait en réalité bénéficié d'une autorisation d'inhumation sur terrain privé la seule légale, qu'il n'aurait pas respectée. L'avocat du fils, Rémy Martinot conteste cette décision en déclarant : « Qu'on ne raconte pas d'histoire. L'administration était parfaitement au courant, elle a toléré la démarche pendant dix-huit ans sans la remettre en cause »[7]. Le fils, Rémy Martinot et soucieux de respecter les vœux de son père, s'oppose juridiquement auprès de la cour d’appel et le Conseil d’État qui refuse l'exception de la congélation comme mode de sépulture.
L’arrêt du Conseil d’Etat du 6 janvier 2006[8] fut le dernier acte contentieux en considérant que malgré le choix du mode de sépulture soit intimement lié à la vie privée, elle peut cependant faire l’objet de restrictions, notamment dans l’intérêt de l’ordre et de la santé publique[9].
Le , alors qu'il s'apprêtait à saisir la Cour européenne des droits de l'homme pour faire reconnaître le choix de sépulture de ses parents, Rémy Martinot se résout finalement à faire incinérer leurs corps[10]. Une panne soudaine fit grimper la température du congélateur à -20 degrés, et le système d'alerte censé prévenir une telle catastrophe échoua. Par conséquent, pendant plusieurs jours, les corps furent exposés à une température insuffisante pour garantir leur préservation[11]. En guise d'épilogue à un combat judiciaire de 22 ans, Rémy Martinot déclare : « Peut-être que l'avenir montrera que mon père avait raison et qu'il était un pionnier »[12].
Bibliographie
[modifier | modifier le code]- L’affaire Martinot ou Prométhée congelé de Jérôme Michel-Edition L.G.D.J, 2015.
Notes et références
[modifier | modifier le code]- « Rêve de glace », Le Monde, (lire en ligne, consulté le )
- « Le couple congelé du château de Breuil est-il hors-la-loi? - Le Temps », Le Temps, (ISSN 1423-3967, lire en ligne, consulté le )
- 1985 : Il congèle sa femme... | Archive INA, INA Société (, 8:54 minutes), consulté le
- « La fin du rêve du docteur Hibernatus », sur ladepeche.fr (consulté le )
- « Un couple congelé devra être inhumé - Le Temps », Le Temps, (ISSN 1423-3967, lire en ligne, consulté le )
- « Décès du père de la cryogénisation », sur Le Quotidien du Médecin (consulté le )
- Par Yves Boiteau Le 14 mars 2002 à 00h00, « Les époux congelés vont être enterrés », sur leparisien.fr, (consulté le )
- « [Brèves] Affaire "Martinot" : conservation de corps par le procédé de congélation », Le Quotidien, janvier 2006, (lire en ligne, consulté le )
- « L’Affaire Martinot ou Prométhée congelé – Le juge, la mort et le rêve d’immortalité - Le Club des Juristes », (consulté le ) : « L’arrêt du Conseil d’Etat du 6 janvier 2006 en fut le dernier acte contentieux. Il rejeta l’ensemble des demandes de Rémy Martinot en considérant que si le choix du mode de sépulture est « intimement lié à la vie privée et que par celui-ci une personne peut entendre manifester ses convictions » celui-ci peut cependant faire l’objet de restrictions, notamment dans l’intérêt de l’ordre et de la santé publique. Ainsi, les dispositions du Code Général des collectivités territoriales, en n’autorisant après le décès d’une personne, que l’inhumation ou la crémation de son corps, lesquelles visent à organiser les modes de sépulture selon les usages et à protéger la santé publique, ne sont pas disproportionnées par rapport à ces objectifs et ne méconnaissent pas, par suite, les stipulation de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales. »
- Par Yves Boiteau Le 17 mars 2006 à 00h00, « Les époux congelés ont été... incinérés », sur leparisien.fr, (consulté le )
- « Transhumanisme : la quête de l’immortalité », sur France Inter, (consulté le )
- « La fin du rêve du docteur Hibernatus », sur ladepeche.fr (consulté le )